Le titre se veut subtil et fin, puisque le personnage principal est chauffeur de taxi, et qu’il est arrêté par la police. Ouarf, on a de l’esprit, en France.
L’histoire est adaptée d’un roman de Iain Levison, "The cab driver" – titre qui ne fait aucun jeu de mots –, et qui décrit une fois de plus les tares de la justice aux États-Unis. Certes, chez nous, la justice collectionne également les erreurs : l’ignoble affaire d’Outreau ; la condamnation de Seznec alors que le corps de sa prétendue victime n’a jamais été retrouvé ; celle d’Omar Raddad, gracié par Chirac mais toujours pas innocenté ; l’odieuse incarcération de Patrick Dills, innocent de seize ans détenu pendant quinze ans et qui a été violé tant et plus sans que quiconque lève un doigt pour empêcher ces horreurs ; et on en passe. Mais, heureusement, nous avons Christiane Taubira, qui a su réformer en profondeur son ministère et mettre fin à tous les abus...
L’ennui, c’est que ce film charge la barque à plaisir, et accumule toutes les tares de la justice et de la police dans une seule histoire, qui, du coup, perd toute vraisemblance. Qu’on en juge :
les policiers n’avaient jamais traité d’affaire criminelle d’enlèvement d’enfant ; ils arrêtent le premier venu, le tutoient et ne l’écoutent pas ; le juge d’instruction, une femme glaciale, applique ce qu’elle pense être la loi, sans jamais faire fonctionner son cerveau (une émule du juge Burgaud ?) ; son avocat commis d’office n’est pas très bon (il sera meilleur à l’audience), mais le prévenu ne songe pas à le récuser ; le procureur déforme les faits et prétend que l’accusé a nettoyé son taxi "afin de faire disparaître les traces d’ADN" ; le président ne corrige pas cet abus ; la mère de l’enfant disparue, qui sait que l’accusé n’a jamais rencontré sa fille, ne songe pas à le disculper ; les deux témoins à charge sont des voyous qu’on a extrait de leur prison et auxquels on a promis une réduction de peine s’ils accablaient l’accusé ; le président du tribunal, qui apprend, après la lecture du verdict de condamnation, que le condamné était innocent, ne le sort pas de prison, car il prétend qu’il faudra plusieurs jours pour accomplir les formalités ; cette avocate qui, après sa libération, se charge de sa réhabilition, à condition de garder quinze pour cent de la somme qu’elle extorquera à l’administration ; cet innocent libéré qui vole un taxi pour aller va trouver la mère de l’enfant enlevée et qui, loin de lui reprocher son silence, entame avec elle un début d’histoire d’amour et offre un cadeau à sa fille...
Pitié ! N’en jetez plus.
La seule raison de voir le film est Reda Kateb, excellent acteur qui a fait ses preuves. Il est navrant de le voir gaspiller son talent au service d’une histoire démonstrative aussi grossière.