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Rentrer en salle pour voir un de ses films a été, est, et sera (on l’espère) toujours une expérience. Et ce n’est pas le succès (mérité) de « Drive » qui y changera quelque chose, ou tout juste à tromper habilement une partie de l’innocence d’un public qui n’aurait pas une vue l’ensemble de son œuvre, la réception d’« Only God Forgives » en témoignait très vite par la suite.
Surprenant, « The Neon Demon » l’est assurément. Passé l’étonnement et la découverte, le film livre après coup, comme tout le temps chez Nicolas Winding Refn, une sacrée gifle quant à la représentation d’un cinéma qui ne sait parfois plus le sens de son origine. Dans son amour de filmer(...)
En premier lieu, un exercice de style impressionnant, dans une beauté graphique et lumineuse qui n’a que peu d’égal ces dernières années, « The Neon Demon » s’habille d’une lumière et d’une mise en scène qui laisse le spectateur à genoux, (les mains jointes et levées en option pour certains, à débattre). Là où certains pourront évoquer un scénario post-it en guise d’exorcisme afin de ne pas être trop subjugués par l’œuvre, il convient de relever le sens même de cette réduction scénaristique. Elle est nécessaire au propos, tout simplement. Conte expérimental et moderne baigné d’un surréalisme pointilleux et onirique, le film se savoure à chaque séquence, chaque plan. Mais cette sensation de l’ensemble du film semble naître à la toute fin, quand le voyage se termine, avec différentes vagues, inégales, délivrées pendant près de deux heures. L’objectivité pousse à noter tout de même une lenteur (utile) au 2/3 du film, il faudra passer le cap pour certains. Pour le reste, c’est un open bar sur ce que peut-être l’esthétique au cinéma tout en décriant le propos que l’on sert, malin et intelligent donc. Critique de la superficialité esthétique dans le film (mannequins, stars, monde « strass et paillettes », donc cinéma inclus). Prise du risque du propos loin des intérêts populaires (qui se passionne réellement pour le off du mannequinat ? ), Nicolas Winding Refn tente tout, même le plus viscéral, le plus violent, le film d’horreur à l’élégance poussée. Révérence.
Il livre un film fou, méticuleux, précis et qui touche à tout. « The Neon Demon » film pluriel, bien malin qui saurait lister toutes les tentatives abordées (philosophiques, anthropophagie, culture moderne, religion, métaphysiques…). Ici, tout est métaphore, proposée avec parfois un humour noir, cynisme et grandiloquence du propos. Sur un rythme électro du grand Cliff Martinez, « The Neon Demon » éclate et laisse KO le spectateur qui accepte cette proposition. Film masse, passionnant et percutant, l’ampleur qu’il impose au spectateur dans sa dernière demi-heure promet un plat savoureux mais à la digestion complexe et conceptuelle, comme à ses personnages (sic). Au-delà de sa forme, Nicolas Winding Refn a su emmener loin sa nouvelle œuvre, moins attrayante et facile que certaines passées mais tout aussi généreuses. Dans le surréalisme sensitif, on ne fait pas mieux pour le moment. Génie probablement, fou et unique, évidemment.