Ah ben voilà un truc qui envoie du steack ! Enfin quand je dis "steack", c’est imagé, hein… Le fait est que je suis ressorti de ce long métrage à peu près dans le même état d’esprit que le très immersif "Du sang et des larmes" (2013), ou plus récemment "American sniper" (2015) : secoué. En lisant quelques critiques des internautes cinéphiles, je me suis aperçu que le patriotisme n’y est guère évoqué, alors que pour bien moins que ça, on jette des tomates pourries sur les œuvres de Clint Eastwood, à cause de son patriotisme soi-disant étouffant. Et pourtant… s’il y a une œuvre à forte tendance patriotique, une tendance portée par le désir d’instaurer la liberté selon la vision du monde occidental, c’est bien "13 hours". Parce que je ne me souviens pas avoir vu un film quelconque (ou alors s’il y en a, ils doivent être peu nombreux) portant à l’écran des paramilitaires opérant sur les lieux d’un conflit, pour contribuer à rendre un pays "libre". Comme cela parait utopique… Je savais que la présence de tels hommes existait, puisque j’en avais entendu parler aux informations une fois ou deux. Oui, l’existence de ces groupes marginaux armés est bien réelle, alors qu’ils ne font pas partie des forces armées d’un Etat malgré leur organisation et fonctionnement semblables à ceux d’une armée professionnelle et officielle. A partir de là, qu’est-ce qui les poussent à rester sur le terrain, si ce n’est le patriotisme et le désir de faire quelque chose de "bien" dans une contrée en proie au chaos, en plus de l’adrénaline ? Pour mettre en scène ce qui ressemble étrangement à des mercenaires engagés dans des pseudos missions qui n’ont absolument rien d’officielles, il fallait des gueules, des caractères bien trempés, un charisme hors norme, et un cœur bien accroché. Pour le coup, c’est le spectateur qui va avoir besoin d’avoir le cœur bien accroché ! Car non seulement le casting a répondu parfaitement aux critères, mais en plus les scènes d’affrontement sont d’un réalisme à couper le souffle. On ressent la tension, il y a de quoi frissonner d’inquiétude quand on perçoit les mouvements suspects, mais bizarrement, on se sent en sécurité avec nos valeureux paramilitaires. D’autant plus que parmi eux, se trouvent James Badge Dale dans le rôle de Rone qui connait bien son job, mais aussi John Krasinski dans le rôle de Jack qui lui non plus n’a pas froid aux yeux malgré son statut de père de famille. Ce sont bien eux qui vont nous amener à subir un épouvantable traquenard, comme si nous faisions partie de leur équipe, en simples observateurs puisqu’il ne nous manque plus que les armes. C’est là que réside le tour de force du réalisateur Michael Bay : on réalise que ce terrible épisode qui s’est déroulé à Benghazi était là aussi un merdier sans nom mettant en scène une impitoyable chasse à l’américain, où toute porte de sortie était impossible. Il est parfois difficile de retranscrire dans le récit toute la véracité d’un fait quand on porte à l’écran une histoire vraie. Mais le réalisateur y est parvenu (avec le concours des comédiens), après une mise en situation courte, précise, mais ô combien efficace, tout en passant par des moments d’intimité, mais aussi par des séquences filmées en caméra portée à l’épaule, des visions nocturnes, et pour finir par des moments de confusion totale durant lesquels, à l’instar de nos héros de l’histoire, on ne sait plus bien qui est avec qui, qui est contre qui. Sur ce dernier point, Michael Bay a réussi à retranscrire toute l’instabilité d’un pays, au fait que rien n’est jamais acquis, et que sans uniforme il est difficile de se fier à des hommes appartenant à une autre ethnie (ou pas). Il pointe également du doigt, peut-être sans le vouloir (allez savoir), la réticence (voire carrément l’immobilisme, ou ne serait-ce que la difficulté, c’est selon le point de vue) de mobiliser des forces de l’armée américaine, ce qui se comprend dans un certain sens, vu que ces paramilitaires sont en mission non officielle. Tout cela n’est pas dépourvu de scènes d’action, bien au contraire. En même temps, avec Michael Bay, nous aurions été étonnés du contraire, malgré un budget "minimaliste" (quatre fois inférieur à son dernier « Transformers », mais 50 millions de dollars tout de même). Mais là où le cinéaste nous surprend, en plus de l’aspect de véracité prêté à son film, c’est la stylisée séquence d’émotions qu’il nous propose en fin de film avec des enfants, des mères, des épouses, qui se penchent avec douleur sur les corps sans vie des hommes tombés sur le champ de bataille. Car quoi qu’il en soit, eux aussi sont des hommes, malgré le fait qu’ils répondent à une idéologie largement contestée. Malgré une construction similaire, "13 hours" n’est pas tout à fait au niveau de "Du sang et des larmes". Cependant, même si ces mecs sévèrement virils sont là sans raison officielle, nous adhérons à leur cause, et le traitement donné à leur histoire rend le film irrémédiablement immersif. Après visionnage, durant des heures voire des jours après, il vous en restera des images, comme si vous aviez pris quelques clichés. Il faut reconnaître que ce film est très photogénique et je pense qu’une exposition de quelques clichés photographiques serait capable de raconter à elle seule toute la dureté de cet épisode, voire de cette guerre.