Il est des moments où la vie s’écoule dans un château de sable, venant fragiliser puis détruire peu à peu l’édifice construit avec amour et patience, dont on était si fier et qui malgré sa superbe s’effondre. Cette impression, submerge Eléonore. Son père tant aimé vient de mourir et il lui faut vider et vendre la maison dans laquelle il vécut ses dernières années Elle se fait aider dans cette tâche, qui semble insurmontable, par Samuel l’homme de sa vie qui lui aussi en est sorti. Fantômes du passé ressurgissent sur ce week end de trois jours où l’amour se rejoue, celui de la fille, celui de la femme… Par son intimisme et sa sincérité, Olivier Jahan nous propose un récit à la Sautet, où les silences parlent souvent plus que les mots, où la souffrance, voire la violence, souligne la retenue des sentiments, Comme chez Sautet, cette histoire simple repose essentiellement sur le jeu d’acteurs imprégnés de leurs rôles, qui savent mettre en valeur un texte adroit. Que ce soit Emma De Caunes qui atteint enfin une maturité et une dimension d’actrice, Yannick Renier sobre et radieux, Jeanne Rosa à l’ambigüité rafraichissante ou un Alain Chamfort qui endosse brillamment le rôle du père à la dimension universelle. Le spectateur, véritable privilégié, est invité à partager des moments ou des pensées volés, dont la voix of lui fait explorer les tréfonds. A l’insu des protagonistes, il connaît mieux tenants et aboutissants d’une mécanique qui se met en place, celle du deuil, bousculant préjugés et convictions. En faisant place nette dans la maison paternelle, Eléonore, Samuel et indirectement Claire, n’auront de cesse de reconsidérer leurs vies. Une sorte de passage obligé en pareille circonstance. « Les châteaux de sable » est une œuvre profonde et douce, basée sur l’intériorité, dont la construction (l’assemblage des scènes, insert de photos, interpellation du spectateur…) renforce ce sentiment d’assister non pas à un film, mais au spectacle d’une vie de laquelle ressurgissent notre propre vécu et nos émotions, pour autant pas dans la douleur aigue, provoquant plutôt, gorge serrée, une belle sérénité.