"Ballerina", film d’animation français réalisé par Éric Summer et Éric Warin, est, à première vue, particulièrement alléchant. On nous propose ici d’arpenter la capitale à la fin du XIXème siècle et de suivre le parcours d’une jeune orpheline qui s’y rend courageusement pour réaliser son rêve de devenir danseuse, en intégrant l’école de danse de l’Opéra de Paris. Techniquement ce film tient largement ses promesses : la qualité de l’animation est indéniable, tout comme l’esthétisme du film. On est délicieusement plongé dans un Paris reconstitué à la perfection à l’époque de la construction de la Tour Eiffel et de la Statue de la Liberté (autour de 1888). L’Opéra Garnier y est flambant neuf, et la vue, depuis son toit, y est imprenable. On se promène à pied sur les rues pavées enveloppées d’une lumière douce et chaleureuse et ni les décors intérieurs, ni les costumes (particulièrement ceux des danseuses) ne sont en reste. Quant à la précision des chorégraphies imaginées par nos deux danseurs étoiles (et non des moindres), elle est tout simplement incroyable ! Les positions, les figures, la grâce des petites et grandes danseuses, et même les échauffements, tout y est. Sur le fond en revanche, le bilan est plus mitigé. Si l’on admet volontiers que la rigueur inhérente à la danse classique, la passion nécessaire à qui voudrait en faire sa vie et la persévérance dans la poursuite de ses rêves sont justement retranscrits, on regrette que les scénaristes n’aient pas été au-delà. Ces aspects sont bien entendu indispensables, mais il aurait fallu y adjoindre d’autres éléments originaux ou alors s’en tenir à cela mais en proposant un point de vue plus moderne. Malheureusement, "Ballerina" reste bien trop classique à tous les niveaux. Qu’il s’agisse de l’unique message transmis (il faut croire en ses rêves et travailler dur pour qu’ils se réalisent) ou du scénario en lui-même, les sous-textes, la profondeur et l’imagination font défaut. Le scénario est cependant sympathique et on a plaisir à suivre les aventures de Victor et Félicie. Victor est passionné d’inventions et Félicie de danse. Ces deux orphelins quittent la Bretagne pour aller à Paris vivre leur rêve. Ils rencontrent alors chacun une personne qui leur permettra d’avancer et de réaliser ses rêves. Félicie réussit à entrer aux cours de danse de l’opéra et grâce à Odette qui va l’entraîner elle arrivera à danser comme une vraie ballerine. L’animation est très jolie, originale dans le style, colorée. Les personnages ont des fois des mimiques particulières qu’il faut aimer mais bon des fois c’est drôle. Les images de Paris sont magnifiques en particulier celles de l’Opéra qui reprend à la perfection son architecture. On se prend aux rêves de Félicie et de Victor. Cependant on regrette ainsi une absence flagrante de créativité dans ce film d'animation, si ce n’est au niveau technique, et les choix contestables des réalisateurs dans leur façon d’introduire une touche de modernité au film. Largement prévisible et bourré de clichés, tout a un air de déjà vu. En découvrant la méchante Régine Le Haut et sa fille Camille, sa coiffure, son allure, son comportement avec la pauvre Odette, ancienne danseuse étoile blessée et condamnée à faire le ménage chez elle pour gagner son pain, impossible de ne pas penser à Cendrillon par exemple. Si l’on ajoute le fait que la petite héroïne (Félicie) soit orpheline, on nage dans le mélodrame excessif qui lasse un peu et pourrait même contrarier les plus jeunes dans certaines scènes. Au contraire, dans la partie où il aurait fallu moderniser le comportement de Félicie, à travers son courage et sa détermination, les scénaristes ont choisi de lui "mâcher" un peu le boulot en facilitant largement son arrivée jusqu’à l’Opéra, grâce à une succession très rapide d’heureux hasards. Passons sur le fait qu’elle tombe incidemment sur une ancienne danseuse qui lui apprendra en quelques jours seulement à devenir la meilleure de la classe au prix d'entraînements intensifs entre deux coups de balai… Quant au fait qu’elle mette son rêve en péril et renie son meilleur ami Victor (de loin le personnage le plus drôle et attachant du film) pour le premier beau gosse à la tête creuse qui lui dit des mots doux, tant elle manque de confiance en elle, on ne peut pas dire que ce soit très flatteur pour le personnage. On regrette ainsi
l'absence d'une romance dans le film, car même si Félicie ne finit heureusement pas avec le "beau gosse blond" elle ne finit pas non plus par être avec Victor qui reste donc son ami à la toute fin du film
. Au final malgré de belles valeurs et de beaux messages, ce film d'animation très classique pêche par l'absence de figures masculines fortes à qui s'identifier (certes il y a Victor mais il est beaucoup trop sous-développé). Au final ce film s'adresse uniquement aux petites filles de moins de 10 ans et c'est bien dommage