Le cinéaste anglais David Farr signe avec « London House » un thriller très ramassé, immédiatement anxiogène et qui, s’il a le défaut d’avoir un scénario ultra convenu, remplit néanmoins son office en nous collant une angoisse qui va crescendo. Le film ne dure même pas 90 mn, du coup il ne perd pas de temps en digressions, il pose d’emblée les données du problème et ne fait pas « de gras ». Aller à l’essentiel, ne pas perdre de temps avec des personnages ou des intrigues secondaires (alors qu’il y aurait peut-être eu des choses à dire sur la relation entre Kate et sa mère), et installer d’emblée une atmosphère, voilà le grand mérite du travail de David Farr. Plutôt bien filmé, en utilisant les décors et les couleurs pour marquer les différences entres les deux couples, pour installer aussi le malaise, Farr cherche là encore à être efficace, quitte parfois à tomber dans le travers du « vu et revu » dans le genre. Un exemple, la musique du film, une musique qui fait penser à une comptine pour enfant et qui cherche à installer paradoxalement une angoisse. Ca marche sauf que c’est tout sauf original et que cela a du être utilisé un bon millier de fois dans des films assez similaires. Propre, efficace mais sans imagination, sans audace, sans vraie créativité, c’est ainsi que je qualifierais la réalisation de David Farrr. Le vrai plus de « London House », ce n’est pas tellement son scénario (j’y reviendrai) mais son casting à 4 : Clémence Poésie est très juste dans le rôle d’une femme fragile, en proie à une forme de dépression post-partum et dont on se demande jusqu’à la fin si elle n’est pas en train de sombrer dans une paranoïa qui finira mal. Stephen Campbell Moore, qui incarne son mari, est un peu en retrait mais très convainquant. Quand au couple de voisin, psychorigides, très angoissants (un poil trop peut-être ? Un tout petit peu de subtilité aurait été la bienvenue), il est très bien tenu par Laura Birn et David Morrisey (oui, oui, le « gouverneur » de « The Walking Dead » !) qui, sans jamais sourire, sans jamais avoir un geste tendre ou altruiste, met tout le monde mal à l’aise dés les premières secondes, jusqu’à sa propre femme. Le scénario est ultra convenu et quand même, on sent arriver les rebondissements d’assez loin :
on a vu « la main sur le berceau » ou « Rosemary’s Baby » ? On a lu l’excellent « Après la haine » de Barbara Abel (qui pourrait être à deux doigt de demander des droits d’auteur sur le film !), alors on devine vite comment les choses vont (mal) tourner
. Le scénario tourne essentiellement autour d’une ambigüité toute simple : Kate a-t-elle raison de trouver l’attitude de ses voisins anormale ou bien son esprit est-il en train de sombrer dans la paranoïa. D’après ce qui est suggéré (mais jamais clairement expliqué) par le scénario, son frère est mort (suicide ?) et ses rapports avec sa mère sont exécrables, quant à son père, il n’existe pas. Cette façon d’insuffler chez le personnage de Kate une sorte de fragilité originelle n’est pas très subtile mais fait quand même en sorte qu’on se pose des questions sur son psychisme à plusieurs reprises, surtout qu’elle a une manie de dévisager les gens qui semble un peu étrange. Le twist final choisit son camp (paranoïaque ou pas ?) et boucle la boucle sans que l’on soit vraiment surpris, à vraie dire. Et comme le scénario ne recule devant aucun artifice en matière de suspens
(« Je ne m’absente que deux petites heures ma chérie, il ne va rien t’arriver en deux heures ! », La bonne blague…),
on se sent même un chouïa déçue par le manque de subtilité de la fin du film. Des thrillers, j’en vois beaucoup, j’en lis encore plus alors pour me scotcher à mon siège, il en aurait fallu nettement plus que cela ! Mais j’imagine que pour quelqu’un qui accepte de se laisser mener par le bout du nez (et comme le film est efficace ça peut le faire), le thriller remplit son contrat et amène ce spectateur bon public à flipper, à s’interroger, et à se laisser surprendre par la cruauté d’une fin assez noire et pour le coup assez crédible. C’est peut-être ça aussi la qualité n°1 de « London House », c’est qu’en y réfléchissant bien, la trame est suffisamment crédible pour embarquer le spectateur et lui coller (un peu) les miquettes !