Elle est un objet étrange, très original, qui provoque une certaine gêne, un grand malaise. Tout le film, ce scénario plutôt bien ficelé au début nous entraîne dans la vie de Michelle Blanc (Isabelle Huppert) au passé trouble et qui se fait un jour agresser et violer. Si l'on est mené en bateau par cette histoire, on commence assez rapidement dans la dernière heure à savoir qui est ce mystérieux agresseur, ce qui enlève tout suspense. Néanmoins, le film sait rebondir en ouvrant un nouveau chapitre qui installe un malaise profond tant le caractère du personnage de Huppert s'avère être flou et très complexe. On la compatit face à ce qu'elle vit au tout début du film puis elle devient antipathique, à la limite entre cruauté et sadisme. Cela rend l'interprétation de Huppert encore plus impressionnante et louable. Oui, encore une fois, Isabelle Huppert a pris un risque avec ce rôle, mais encore une fois, elle s'en sort admirablement et prouve qu'elle est l'une des meilleures actrices françaises.
Au niveau des seconds rôles, si Virginie Efira apparaît bien effacée et occupe un personnage dont le côté catholique poussé à l'extrême et vulgarisé ne sert aucunement le film, on retiendra les performances de Laurent Lafitte, très bon, et d'Alice Isaaz, qui sort du lot en petite amie virulente du fils d'Isabelle Huppert. Cela nous amène directement au thème de la famille qui est difficile à cerner mais qui essaie de faire son nid dans ce film étrange à travers cette famille déchirée entre deux parents divorcés, un fils qui a arrêté ses études et le passé extrêmement compliqué d'un grand-père en prison. Cela permet d'accentuer le charisme de Huppert, femme forte qui résiste à la pression grâce à une froideur déconcertante. Mais si celle-ci parvient à s'élever, c'est en délaissant des personnages comme ceux du fils ou du père, interprété par Charles Berling, ce dernier qui malheureusement est mal exploité, servant plus comme une occasion de rajouter des dialogues dramatiques conventionnels du mari divorcé. Et finalement, de cette famille, on ne retient que Huppert...D'ailleurs, la fin sonne tellement fausse par rapport au reste du film que l'on a l'impression que Paul Verhoeven ne savait pas quoi faire de ses personnages et qu'il s'en est débarrassé lui et son scénariste, David Birke, de manière honteuse, masquant ce procédé scénaristique par une happy end qui mettrait tout le monde d'accord.
Personnages non aboutis, scénario très inégal, si Isabelle Huppert se démarque considérablement de par sa sublime interprétation, Elle ne parvient pas à captiver, Paul Verhoeven, malgré une mise en scène recherchée, notamment lors des scènes d'agression, ne réussissant pas à maintenir le côté thriller de son film en surface ni le spectateur en haleine. On remarquera d'ailleurs que dès qu'il parvient à installer une atmosphère psychologiquement intéressante, tout retombe assez vite et passe à autre chose, symbole d'un long-métrage qui se voulait choc sans l'assumer vraiment.