Melki. C’est le premier nom qui nous vient en tête lorsque, la projection terminée et les premiers verres entamés, les discussions autour du film débutent. Peut-être parce qu’il sera nominé pour le César de la meilleure interprétation masculine, sûrement parce qu’il est l’un des seul objectif du film à être réellement réussi, aussi… « Vendeur » est d’abord une histoire de désillusion au cadre froid et impersonnel qui se déroule dans des paysages humides, entre banlieue parisienne et décor Nordique. Toute la famille que met en scène le réalisateur, qu’elle soit formelle (fils, père, grand-père) ou non (la hiérarchie dans l’entreprise) n’est chaleureuse que lorsque ses membres rapportent de bons points, en outre un plus financier à un système bien rodé. Ainsi, lorsque Gérald fait faillite avec son restaurant, c’est un rêve dont il perd les rênes. « C’est ce qui arrive lorsqu’on veut faire autre chose que du surgelé », s’énerve alors un Pio Marmaï à l’interprétation intéressante, bien qu’assez linéaire. Le film traite d’une société à deux vitesses, caractérisées par les personnages du père et du fils : tandis que l’un tente de survivre grâce à l’authenticité de sa passion pour la cuisine, accompagné pour l’aider de sa « future » femme (Clémentine Poidatz étonnamment juste dans tous les registres, autant dans celui de la colère que de la joie), l’autre possède une vie dévorée par la superficialité, entre fêtes d’entreprise dans lesquelles alcool, drogue et danseuses de charme passent sous son nez à lui, père plus absent qu’aimant. Il n’a pas de femme, mais voit des prostituées. Preuve de plus qu’il ne croit pas à l’amour, au vrai, mais préfère se placer dans un univers sexuel sans danger, car sans engagement. Mais, à un moment, le film perd pied. Sylvain Desclous, bien qu’il soit brillant lorsqu’il met en scène la mise en abîme de ses personnages, pousse le bouchon de la caricature de la solitude un peu loin lorsqu’il filme Melki, seul la nuit dans sa belle bagnole, les lumières comme fatiguées des lampadaires éclairant des bouts de son visage, derrière son pare-prise et ses lunettes de vue. Tout est trop marqué, remarqué. Les rebondissements sont pour la plupart attendus, tant que le film plonge dans une sorte d’hibernation latente à mesure que les personnages du père et du fils se rapprochent, suivi par l’inversion des personnalités de ces derniers. Sara Giraudeau débarque alors en Chloé. Ce n’est plus seulement du sexe qui est montré à l‘écran, mais de l’amour; Serge sait qu’il vient de tomber en plein dedans, quelques scènes après l’annonce de son cancer. Ils ont de sacrés voix; à eux-deux ils pourraient raconter des histoires et des histoires, sans jamais que la personne qui les écouterait ne se lasserait. Mais face aux scènes entre ces deux personnages, l’alchimie ne prend pas. On s’ennuie : trop de dialogues plats, décousus, on a cette impression que ces plans bercés par la lune ne se termineront jamais. Le film en lui-même, parfois, donne cette mauvaise impression au spectateur de ne le mener nulle part. Celui-ci doit presque s’accrocher si il veut rester jusqu’au bout. Certains de ses confrères n’y sont pas parvenus.