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    A la folie
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    🎬 RENGER 📼
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    7 356 abonnés 7 544 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 2 février 2023
    Dans un hôpital psychiatrique municipal du Yunnan (au sud-ouest de la Chine) accueillant plus de 200 patients (hommes et femmes), le cinéaste Wang Bing (À l'ouest des rails - 2003) y a posé sa caméra et à suivit l’errance et la solitude de ces derniers pendant 4 mois. Ils sont tous internés contre leur gré, aussi bien par leur famille que par la justice. Parmi eux se trouvent des patients violents et non-violents, meurtriers, toxicomanes, alcooliques, atteints de dépression nerveuse ou tout simplement pour avoir participé à une pétition (opposants au régime) ou étant atteints d’une déficience intellectuelle.

    À la folie (2013) 瘋愛 est une immersion au sein d’un hôpital psychiatrique, comme l’avait déjà fait auparavant Frederick Wiseman (Titicut Follies - 1967) ou encore Raymond Depardon (San Clemente - 1982). Du cinéma vérité, sans fioriture où le réalisateur est au plus près des patients, caméra au poing, il suit leur moindre faits et gestes, de leur chambre en passant par la salle commune. Cet hôpital est sur 3 niveaux, les femmes sont regroupées au rez-de-chaussée tandis que les hommes sont aux étages supérieurs. Pendant toute la durée du tournage, le cinéaste l’aura passé au 2ème niveau où toutes les chambres donnent accès à un seul et unique couloir circulaire, comme une coursive donnant sur une cour extérieur inaccessible car les barreaux viennent rappeler que cet hôpital est avant tout une prison (que leur reste-t-il de leur liberté ?). La vétusté de cet hôpital ne fait aucun doute, les murs décrépits détonnent avec le blanc immaculé des draps (sans doute la seule chose de propre dans cet établissement).

    Ce qui choque en premier lieu, c’est de constater que, quel que soit le motif pour lequel ils sont internés (meurtriers, déficients ou opposants politique), ils se retrouvent tous au même endroit et ce, quel que soit leur degré de dangerosité. Les internements oscillent entre les longues et les courtes peines, 3 ans pour l’un et jusqu’à 20 ans pour l’autre.

    Pendant près de 4h (sur 300 heures de rushes), le réalisateur nous emmène à leur rencontre, ils tuent l’ennui comme ils peuvent, ils errent sans but dans ce couloir sans fin ou passent le plus clair de leurs temps allongés dans leur lit. Le corps se meurt à petit feu aussi vite que l’esprit (non sollicité) se dégrade. Bien souvent, on a l’impression qu’ils sont sans surveillance (on voit rarement les médecins), aussi bien le jour que la nuit. Certains patients urinent dans leur chambre, d’autres à même le couloir. Leur chambre est devenue leur unique refuge et leur lit un havre de paix où ils méditent, mangent, fument voire même s’échangent quelques caresses et plus si affinités (en partageant parfois le même lit). Certains sont littéralement assommés par les médicaments et d’autres reçoivent de la visite.

    Alors que les ¾ du film se déroulent intégralement au sein de l’établissement psychiatrique, comme une bouffée d’air frais, le réalisateur va jusqu’à suivre un patient en permission de sortie, se rendant à cette occasion chez ses parents. Ce sera la seule et unique fois où il nous sera permis de voir autre chose que cet hôpital crasseux.

    La folie des hommes dans la Chine contemporaine, celle que l’on n’a pas l’habitude de voir, voilà ce que nous permet de voir Wang Bing.

    ● http://bit.ly/CinephileNostalGeek ● http://twitter.com/B_Renger ●
    gimliamideselfes
    gimliamideselfes

    3 097 abonnés 3 970 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 11 août 2022
    Si j'ai toujours beaucoup d'appréhension avant de lancer des films qui sont très longs (c'est la raison pour laquelle je m'étais quasiment pas encore attaqué au cinéma de Wang Bing) la longueur ici est nécessaire. Elle enferme le spectateur pendant quasiment quatre heures dans un asile chinois, à une escapade d'une dizaine de minutes près.

    Et franchement, c'est une certaine idée de l'enfer.

    On est coincé dans l'étage des garçons qui est simplement une coursive, où on voit les types emprisonnés déambuler pendant des heures. Vu que le film est long, on a le temps de suivre pendant parfois plusieurs dizaines de minutes une personne, la voir supplier qu'on lui enlève ses menottes, la voir pisser contre le mur de sa chambre, se balader à poil, le tout dans des conditions absolument insalubres.

    Ce qui est terrible c'est qu'on sent bien qu'il y en a où ça cogite pas mal, qui ne sont pas vraiment fous voire même qui ont l'air conscient de ce qui se passe ici. L'horreur. D'ailleurs c'est confirmé par le texte à la fin du film expliquant que cet asile regroupe des psychopathes, des types qui se sont battus, des dépressifs, des types qui étaient trop dévots... qu'ils sont tous mélangés... Et durant le film on a vu qu'ils sont livrés à eux-mêmes, qu'il n'y a quasiment aucun encadrement, aucune activité... rien.

    Finalement c'est ça que filme Wang Bing, c'est l'horreur de cet éternel ennui de ces gens qui n'ont rien à faire, aucune activité n'est proposée... Les gens ont juste une vieille télé cathodique (le film date de 2013) et c'est tout. Pas de salle où faire du sport, pas de parc où se promener, pas de jeux, pas de livres, rien. Ils fument pour faire passer le temps et attendent la visite de leur proches pour leur demander à pouvoir sortir (ce qui est quasiment systématiquement refusé).

    Les types sont coincés là pendant parfois des décennies, si on n'était pas fou en entrant, c'est sur qu'on le devient en restant là.

    Et nous spectateurs, nous sommes là, captifs devant le film à regarder ce traitement inhumain et à chercher un peu de baume au cœur dans les rares interactions sociales qui ne soient pas des cris.

    Je suppose que voir ce film en salles est pire encore puisqu'on n'a aucune échappatoire.

    A la folie n'est pas misérabiliste, il ne cherche pas à faire chialer, ça ressemble plus à une baffe de réalité en pleine gueule, où si on excepte le texte à la fin du film précisant le contexte, on ne nous dit jamais quoi penser : les images parlent d'elles-mêmes.

    En somme c'est sans doute l'un des films les plus difficiles qu'il m'ait été donné de voir. Accepter que ce l'on voit arrive en vrai, que ces gens restent là des dizaines d'années, qu'ils ne peuvent pas sortir, qu'ils vivent dans leur pisse, dans quelques mètres carrés, entassés comme des bestiaux...
    La force du film est de réussir à nous faire sentir, ou du moins approcher, ce que sont les conditions de vie dans cet asile.
    In Ciné Veritas
    In Ciné Veritas

    94 abonnés 922 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 5 mars 2016
    Plongée radicale et sans concession dans une institution psychiatrique chinoise. Wang Bing pose son regard sur les laissés-pour-compte de la Chine contemporaine. L’expérience cinématographique proposée est d’abord éprouvante puis glaçante. Le portrait dressé est terrifiant et définitivement marquant.
    Plus de détails sur notre blog ciné :
    TIKICO
    TIKICO

    2 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 12 mai 2015
    Très intéressant enfin de voir un docu- film qui montre une autre réalité , moins glamour et enfin sociale d'un si grand pays qui aliène et muselle un si grand nombre. On pourrait dire comme dans la chanson qu'en général: "on nous cache tout on nous dit rien, plus on avance plus on ne sait rien." alors ce film est bien venu.
    Daniel C.
    Daniel C.

    150 abonnés 721 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 30 mars 2015
    Passer quatre heures dans une salle de cinéma tient malgré tout de l'exploit. C'est un document ethnologique intéressant, une plongée dans un univers psychiatrique carcéral. Un bâtiment rectangulaire avec une coursive sur les étages. Ces balcons continus sont en quelque sorte le lieu de déambulation, de circulation, d'errance, d'exploration, de rencontre. Les chambres sont collectives, le personnel soignant peu présent, c'est un peu comme si les patients se régulaient entre eux. La pudeur a rarement cours, les échanges sont brusques parfois, mais la violence réelle semble rare. J'ai plutôt eu parfois l'impression que l'on a au zoo, en regardant les singes, qui se cherchent, se poursuivent, se trouvent parfois. La sexualité semble parfois du registre prégénital, comme si la tendresse primait sur le sexe. Une femme visite son mari, on les voit plusieurs fois, ce qui nous permet de voir le patient dans différents états, notamment lorsque son fils est présent avec sa mère. Cette femme a une attitude et une patience extraordinaire, lui veut sortir, elle lui explique que ça n'est pas possible actuellement. Un patient et une patiente sont amoureux, lui est à l'étage des hommes, elle en dessous à celui des femmes, néanmoins, ils se rencontrent à travers les grilles sur le palier de l'étage des hommes. Drôle d'environnement où la folie semble contenue. Le commentaire final semble parler d'internement abusif, en tout cas, la chronicité des troubles mentaux est clairement exposée. Quel traitement autre que médicamenteux en est fait, l'histoire ne le dit pas...
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 24 mars 2015
    Nous sommes 4 courageux dans la salle. Qui vient par attrait par la Chine, comme moi ? Qui vient par intérêt pour le sujet, la psychiatrie ? Entrée au cinéma 19h45, le temps des bandes-annonces et du film, j’en suis ressorti à 23h45… Mais Wang Bing ne pouvait pas faire plus court, le temps – ou plutôt la perte de temps – est essentiel(le) pour comprendre le quotidien de ces gens. Au bout d’un moment on ne sait plus si cela fait 2 heures que nous sommes là, ou 1h30, ou peut-être déjà 3… on vit presque cet enfermement. Nos heures sont peut-être leurs jours. Leur quotidien est une sorte de jour sans fin. Il est important de voir ce film sur grand écran, sans pauses, sans montre. Il faut accepter de perdre un peu ses repères et on est même surpris de voir la fin pointer le bout de son nez, alors qu’on ne l’attendait plus. Le tour de force de Wang Bing est d’avoir réussi à se faire complètement oublier afin de nous montrer la réalité telle qu’elle est, sans artifices, sans mise en scène. Au delà du documentaire, nous sommes dans l’immersion, dans l’humain. Nous partageons tout avec ces « fous » : le bonheur, les engueulades, les rires, la routine, les crises, l’intimité… La vie quoi. « Fous » entre guillemets car tous le ne sont pas. Certains le sont, indéniablement, mais d’autres sont enfermés plus des raisons politiques ou religieuses. En tout cas, tous contre leur gré. Certains ne sont pas fous mais finiront peut-être par le devenir, hébétés par l’enfermement. Un petit détour « hors des murs » de l’institution nous fait remarquer que tout retour à la vie normale est vain. « Les gens comme nous ne peuvent s’offrir que le sommeil » affirme un des internés. Evidemment le film ne plaira pas à tout le monde. Mais cela vaut le coup, rien que pour l’expérience.
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 20 mars 2015
    Et bien, je ne m'attendais pas à cela. Je croyais voir un asile, avec des personnes suffoquant leurs angoisses, délaissant la réalité, du bon rinçage d’œil, sous couvert de documentaire sur le milieu d'internement.Et ce n'est pas tombé loin, si ce n'est que ce film est merveilleusement subversif, 3h45 qui passent comme un charme, un réalisateur qui ne prend jamais ses sujets pour des cons, ni nous, spectatuer, pas de mélo, pas de pathos, pas de musique pour faire joli, juste des hommes et des femmes, isolés dans cette hôpital/prison/asile... où tout se mélange, entre les pleurs et les médications.

    spoiler: On pourrait croire à l'infini malheur de ces internés, mais voyant les conditions de vie hors les murs, on en viendrait presque à les envier...
    brunetol
    brunetol

    193 abonnés 179 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 16 mars 2015
    Face à un tel film, je me pose une quantité de questions. Je me trouve face à une entreprise pratiquement impossible à critiquer : en pointant sa caméra sur quelques damnés de la terre, parqués dans le dénuement d'un asile qui tient bien plus de la prison que l'hôpital psychiatrique, Wang Bing extirpe du néant quelques figures humaines et leur offre une forme d'existence aux yeux du monde. Le mode opératoire est courageux, trois mois en immersion complète entre ces murs suintant de crasse et de la pisse des internés eux-mêmes, qui se soulagent à volonté (Wang Bing laisse la merde hors champ, avec une insistance presque spectaculaire), errent nus avec leur bassine dans le promenoir circulaire et grillagé, déambulatoire misérable, cour des miracles qui tient lieu de décor principal. On se doute que le film s'est construit au montage, à partir de centaines d'heures glanées au fil des jours, et Wang Bing a subtilement sélectionné ses sujets et organisé leur exposition, de sorte que les personnages s'inscrivent petit à petit dans le regard du spectateur jusqu'à devenir des figures familières. Après 3h47, on sort avec le sentiment d'avoir presque vécu avec ces gens, et c'est la grande qualité du film. Leur comportement, leur étrangeté et leur humanité bafouée dans ce cloaque suffocant sont suffisamment singuliers pour nous tenir éveillés et attentifs. Wang Bing semble jouer la carte de l'humilité face à cette misère noire, et à l'inverse d'un Pedro Costa dont la maîtrise éblouissante du cadre et de la lumière élève les films à une dimension plastique d'œuvres d'art, il se contente d'une seule focale - à de très rares exceptions près -, laisse l'exposition et le point en mode automatique, et se moque d'être en sous-exposition constante : ce qui compte, c'est d'être à la meilleure place pour capter le réel. L'image est souvent grise, copieusement bruitée faute de lumière. Les personnages apparaissent souvent dans un brouillard laiteux et fourmillant, à peine peut-on distinguer leurs traits. A ce prix, Wang Bing est parvenu à être transparent. La présence de la caméra semble aussi familière aux internés que l'ennui lancinant qui les lobotomise petit à petit, au fil des mois et des années passées dans ce purgatoire putride. Si l'image est négligée, le son, par contre, est l'un des points forts du film. Le silence n'existe pas, on a l'impression que même au cœur de la nuit, la télévision de la salle commune reste allumée et crache ses miasmes inarticulés, et dans la cour il y a toujours un gémissement, un cri, une plainte, pour occuper l'espace sonore et renforcer la sensation d'aliénation. D'où vient alors ma résistance à attribuer au film une valeur de chef d'œuvre, ou de lui écrire un dithyrambe ? Peut-être parce que précisément, il se résume à ce qui précède. Le constat est glaçant. Ce que ce film dit de la Chine profonde est accablant. Mais il ne s'élève pas au-dessus du statut de "document", quelque chose manque d'une mise en perspective plus vaste ou d'un point de vue plus affirmé. Ce que d'aucun pourrait considérer comme sa qualité suprême.
    Benito G
    Benito G

    677 abonnés 3 162 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 12 mars 2015
    Vu totalement par hasard, je dois dire que ce docu pousse son sujet à l'extrème! Ou certains du public restent d'être plus ou moins "troublé". Ce qui est traité, évidemment on s'en doute plus ou moins mais on essaie de pas trop en parler... Là, on nous montre le constat accablant et vraiment percutant. LA misère humaine montrée est "pitoyable" à l'extrème et on ne souhaite cela à personne. Loin des petites cliniques de chez nous... Pour ne pas plus accabler le spectateur, le "film" vire un peu au coté romesque" et sa nous fait un vent d'air frais! L'ensemble ne ressemble pas à un centre bateau, mais plutôt à un univers carcérale (au mur infranchissable...).LE tout, d'une dureté à toute épreuve. Une oeuvre accablante, éprouvante et difficile d'accès ; ne serait que visuellement qui ne peut laisser insensible malgrè la durée qui approche les 4h. Totalement scotché!
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