On avait rarement vu Luchini aussi touchant, aussi humain finalement, face à une femme. D'habitude, on le trouve un peu agaçant de par sa manière excessive d'articuler, de ramener des références au point de ne pas saisir son propos personnel, mais là, il faut dire qu'il a abandonné son style d'intello autodidacte au profit d'une interprétation douce et sensible, que tout le monde pourra comprendre grâce à sa simplicité, sa précision dans le propos. Certes, la toile de fond, c'est un procès: Christian Vincent en profite pour dépeindre ce milieu, ses personnages, leurs relations, leurs ragots quotidiens... Jusqu'à ce que le cynisme du Président (notre ami Fabrice, donc) bascule dans l'amour, quand il s'aperçoit qu'une des jurés est une femme dont il était tombé amoureux auparavant. Il va tenter de renouer avec elle, et à partir du premier café, s'enchaîne un double rapport entre celui qu'ils doivent avoir à la Cour et celui qu'ils ont le soir, leur verre à la main, évoquant le passé, l'indécision de leur amour. Ces scènes sont filmées comme des moments intimes qu'un enfant prendrait en secret, caché derrière la porte. Tout y est timide, très naturel et surtout, lumineux. Contrairement aux séquences dans le tribunal, où la mise en scène de la justice devient une véritable pièce de théâtre. Ce n'est pas un film qui vise haut, mais un film qui vise juste. On notera l'interprétation de Sidse Babett Knudsen, remarquable, mise à côté de son compère Luchini,parvenant même à lui faire passer sa grippe, quand, à la fin du film, elle le regarde avec la tendresse de deux amants inavouée.