Ah ! Benchetrit m’avait manqué ! Exit les facilités et les conventions bien connues de « Chez Dino ». Avec cet « Asphalte », l’ami Samuel revient a son goût du lieu, du cadre, et du personnage singuliers. Je le reconnais, ce n’est pas évident de faire de la poésie avec des instruments insolites. Mais bon, moi, personnellement, c’est aussi cela que je demande à un artiste : m’offrir quelque-chose qui n’est pas évident à faire et qui n’en est que d’autant plus touchant lorsqu’il fonctionne malgré tout. Et oui, pour moi ce film fonctionne. Après, son souci, c’est que sa démarche passe par une logique de film chorale, qui consiste à raconter trois rencontres qui n’ont que pour seul et unique lien le lieu où elle se déroule. Et pour moi, ne pas lier suffisamment les intrigues, ça amène forcément le spectateur à partitionner ce qu’il voit et ce qu’il ressent. En tout cas, moi, c’est ce qui m’est arrivé, et du coup j’en suis venu à avoir des sentiments très inégaux selon les binômes qu’on me présentait. (
Pour ma part, mon préféré fut – de loin – l’histoire entre Aziza et McKenzie tant les contrastes sont absurdes et donc aussi très touchants. La rencontre entre M. Sternkowitz et l’infirmière m’a aussi beaucoup plu mais elle m’a un peu plus lassé sur la fin, à force de se répéter. Enfin, je dois bien reconnaitre que je soupirais quelque peu quand revenait en avant l’intrigue entre l’actrice et l’ado. Moins fouillée, plus classique, plus attendue, elle m’a très vite ennuyée.
) Mais bon, bien qu’inégal à cause de son intrigue compartimenté, « Asphalte » a malgré tout très bien marché sur moi. Et s’il a bien marché et aussi et surtout parce qu’il a su être avant tout très touchant. Benchetrit aime ses personnages, quels qu’ils soient, et ça se sent. Dans ce film, tout le monde est le héros, du fils tolard au cosmonaute, du beauf à l’ado tête-à-claque, de l’actrice huppée aux simples glandeurs de toits d’immeuble. Pour le coup, il y a un regard d’enfant totalement assumé dans cet univers, qui fait du bien et qui est revigorant. Par ce film, le message de Benchetrit est simple, presque symbolisé par sa résolution au mystère du bruit étrange qui entoure toute la cité : qu’importe ce qu’on prend comme matériel de départ, on peut en faire quelque-chose de très beau à condition qu’on se laisse prendre par un autre regard et surtout, par la magie de notre capacité à chercher de la poésie partout…