Avec une carrière américaine de platine comportant des grands films comme Vol au-dessus d’un nid de coucou, Amadeus ou encore Taking Off, Milos Forman mériterait sans conteste sa place au cœur des plus grands réalisateurs du cinéma moderne. Si chaque long-métrage réalisé par ses soins ne ressemble à aucun autre, on peut tout de même reconnaître un élément commun à presque tous (Au feu, les pompiers pas terrible et Les Fantômes de Goya, guère exceptionnel) : la virtuosité. Nous pouvons sans mal demeurer subjugués de voir une telle maîtrise de la mise en scène. Chaque sujet, Milos Forman se l’approprie sans difficulté et parvient à nous toucher en plein dans notre cœur de cinéphile. Par conséquent, le voir faire équipe avec un acteur de renom comme Jim Carrey ne pouvait provoquer que des étincelles… Le biopic, Forman s’y est déjà attelé avec la fresque quasi-drolatique sur Mozart, le culte Amadeus. Avec Man on the Moon, c’est la vie d’Andy Kaufman qui se voit portée à l’écran… Kaufman, c’est ce comédien. Cet homme du spectacle qui se refuse à être appelé « comique » pour la simple et raison qu’il n’a jamais vraiment voulu faire rire. Ce qui intéressait Kaufman, c’était d’emmener le public là où il le souhaitait lui. S’attirer les foudres de millions d’américains stupidement manipulés ne lui prenait qu’un dixième de seconde. C’est dans ce rôle que nous retrouvons l’hilarant, le grand, le caméléon, Jim Carrey. Une performance de toute beauté qui lui vaut bien l’une de ses meilleures prestations tant, plus que jamais, l’acteur s’approprie le personnage pour mieux l’incarner en face de la caméra. Du début à la fin, on y croit. Cette aventure là, on voudrait y croire. Nous sommes le fameux public du film – à la seule différence que jamais on ne se détache du génial protagoniste : on ne sait pas que prendre au sérieux ni quand croire véritablement cette personnalité si complexe. Pas un seul instant Man on the Moon ne cesse de jouer avec notre réflexion et, à de nombreuses reprises, on tombe de haut à l’arrivée de la chute. En d’autres termes, tout cela se résume à une direction de spectateurs purement virtuose… Par ailleurs, est-ce Jim Carrey, le scénario, ou encore le spectre d’Andy Kaufman qui se plaît tant à nous surprendre ? Sans doute les trois à la fois, à vrai dire ! Une autre facette particulièrement intéressante de ce Man on the Moon concerne l’envers du décor, ou plutôt, la cruelle exhibition de l’intérieur de votre télévision. Tout l’univers d’Hollywood y est décortiqué de fond en comble et sans vergogne. Les producteurs véreux passent à la casserole au même titre que les spectateurs abrutis qui ne savent penser en s’extirpant de la masse – si encore ils en étaient capables. Comme si Milos Forman avait souhaité respecter l’avis que se faisait Kaufman de cet Hollywood toujours à la recherche d’incommensurables profits et qui ne se soucie aucunement de la qualité de ses programmes. Télévision, synonyme de déchéance. N’hésitez plus à plonger dans cette désopilante satire du milieu de la télévision, aux côtés d’un Jim Carrey plus délirant que jamais dans un rôle qui lui colle à la peau. Un grand film de plus pour le virtuose Milos Forman…