Kenneth Lonergan, s'appuyant sur la solide prestation de son acteur principal, Casey Affleck légitimement récompensé aux Oscars, livre un long métrage inespéré, un puissant drame familial qui nous renvoie inévitablement à une époque ou l'aspect humain primait sur les artifices. Épuré, habile, Manchester by the Sea se veut un film complet, dramatique, une œuvre solitaire dans un paysage cinématographique bien morne. Il convient donc de saluer l'effort, d'offrir enfin à ce cinéaste qui n'en est pourtant pas à ses premiers faits d'armes toutes les considérations qu'il convient.
Casting solide, on l'a dit Casey Affleck, résigné, blessé par les drames d'un passé pas si lointain, s'il tient à lui-seul une bonne partie du film sur ses épaules, partage l'affiche avec des excellents Kyle Chandler, Michelle Williams ou encore Lucas Hedges, tous parfaitement crédibles, droits dans leurs bottes. Le cadre, lui-aussi, se veut d'une importance cruciale, soit le littoral d'un nord-est d'apparence si sereine qui pourtant couve toutes les misères du monde pour une famille Chandler éclatée, souffrant des affres d'un destin qui ne leur à rien épargné. Entre la maladie des uns, l'accident tragique des autres, quel avenir espérer?
Le réalisateur, maîtrisant parfaitement la chronologie de son œuvre, jongle entre passé et présent, entre causes et effets. Jamais le film ne se veut mélodramatique, juste naturellement humain, poignant. Jamais le film ne s'égare, jamais il ne se complait dans une facilité quelconque. Le personnage principal, Lee Chandler, dont on ne connaît initialement rien, va murir à l'écran, à mesure que nous découvrirons ses maux du passé, au fil des évènements du présent, forcé de prendre sous son aile son neveu alors que lui-même ne semble pas pouvoir s'assumer.
Manchester by the Sea, c'est aussi, finalement, un très beau pamphlet contre la résilience, le portait même de la vie lorsqu'elle s'efforce de reprendre le-dessus. On notera que dans son exercice, Kenneth Lonergan nous fait l'offrande d'une bande-sonore tout-à-fait formidable, aussi vivifiante que variée. Pour autant, si je salue humblement les mérites de ce film, je ne me rangerais pourtant pas dans le camp des majoritaires, ceux qui voient en ce film le chef d’œuvre indéboulonnable de l'année 2016. Allez savoir pourquoi, il m'aura manqué quelque chose, ici, pour que j’adhère complétement. Mais s'agissant là d'une très belle réussite, laissons chacun s'y faire sa propre idée. 15/20