Uppercut, pluie de coups, lame enfoncée dans la carotide, les premières secondes donnent immédiatement le ton. Alexandra Lange fut jugée à Douai le 18 juin 2009 pour le meurtre de son bourreau qui la torturait depuis 14 ans. A coups de flashbacks, cette adaptation cinéma illustre bien sûr la narration de l’atroce calvaire enduré par tant de femmes, mais il frappe encore plus efficacement par l’enseignement de la logique de l’asservissement volontaire des victimes, adressé à ceux qui ne parviennent pas à comprendre comment on peut en arriver là.
Lycéenne complexée au départ, son mari n’a d’abord que l’autorité de son âge. Et puis despotisme s’infiltrant doucement jusqu’aux dernières détails, dévalorisation et culpabilisation, privation de droits et de mouvements, vulgarisation méthodique de la violence, exercice de la honte et du chantage qui assurent le silence, actes de torture, terreur, démolition définitive par la prostitution, amènent en effet la victime à une absence de choix et à sa transformation, avec les trois enfants, en instrument d’exutoire quotidien et consentant pour un monstre malade comme il en existe pourtant tellement.
Le réalisme de la violence, les enfants et l’épouse tant détruits que cabossés font de ce renversant téléfilm franco-belge un insoutenable supplice clairement pour adultes. Ce qui peut paraitre surréaliste au début, y compris le déni de réalité apparemment lâche de la martyre, se traduit par une longue horreur sadique qui s’assimile abominablement, et se surajoute au combat judiciaire, souffrance supplémentaire qui retourne tripes et glandes lacrymales. Témoignage authentique, journalisme, leçon psychologique, film d’horreur même, on peut le dire, Claude-Michel Rome en fait aussi le réquisitoire de l’indifférence sociale et de l’incompétence dépassée de la Police ou des services sociaux en France.