En Bref
Un film à l'ambiance singulière, très bien interprété et mis en scène. Il échappe même à certains clichés que je pensais inévitables pour un Marvel de ce type (univers lié à Captain America, en mode thriller/espionnage), mais tombe bien sûr dans d'autres qu'il aurait pu éviter. Le final vient même tout gâcher pour laisser place à un outil marketing qui change brutalement l'hommage à Black Widow en pub pour Disney+. On redescend sur Terre très rapidement.
Plus en détail
J'ai été longtemps réticent à aller voir le film à cause des critiques : classique, cousu de fil blanc... et chose rare depuis un certain temps, aucune hype devant la bande-annonce (contrairement aux derniers Avengers ou sorties Marvel de cette fin d'année 2021). Plus le fait qu'il s'agit d'un préquel, donc qu'il ne fera pas avancer le MCU. Mais d'un autre côté, il s'agit d'un personnage central depuis le premier Avengers et dont la mort m'a touché, donc je lui ai donné sa chance.
C'est plutôt une bonne surprise ! En fait, je lui donne une note proche de sa moyenne globale mais pas pour les raisons que j'ai pu généralement lire, parce que le film a ses originalités. Dès son introduction il est sombre, traîte d'un sujet ultrasensible et nous entraîne dans un thriller certes pas extrêmement poussé mais mis en scène avec brio. Une traque à double sens
, d'un côté pour supprimer pour de bon celui qui a pourri la jeunesse de Black Widow et sa "soeur" Yelena, de l'autre pour récupérer l'antidote contre l'embrigadement forcé des veuves
; un arc familial pas si superficiel
, puisqu'il ne s'agit pas du tout d'une vraie famille
, le tout sur fond de contrôle des masses (
la démonstration sur des cochons apporte un côté absurde et malaisant assez nouveau
).
De plus le casting est particulièrement convaincant, et ce sont pour moi Florence Pugh (Yelena) et David Harbour (Red Guardian) qui mènent largement la danse. L'une parce qu'elle apporte une énergie fraîche, novatrice et très expressive, l'autre parce que je trouve son rôle très bien écrit, avec un ridicule pas du tout niais et inattendu de super-héros qui n'a jamais eu son heure de gloire. D'ailleurs l'ambiance globale est très spéciale, on échappe à certains clichés du genre.
Par exemple, l'explication calme et détachée de Melina des horreurs commises par la Chambre Rouge, sans musique en arrière plan, montre la conviction des méchants sous un nouveau jour : ce qu'ils font n'est pas diabolique, c'est normal pour eux. On assiste alors à des dialogues surréalistes étonnants et en accord avec l'ambiance globale.
Très intimiste dans son milieu, je n'ai pas trouvé les dialogues trop longs et ennuyeux, au contraire ! Inutile de faire vivre à Natasha 1001 dangers dont elle survivra à coup sûr, c'est bien mieux de lui apporter de la profondeur, c'est le but du préquel. Cinématographiquement donc, j'ai trouvé une maturité et une singularité très agréables dans ce Marvel.
On n'échappe pas cependant aux mitraillettes qui ratent leur coup comme pas permis (vraiment flagrant), à une baston entre frangines en guise d'accolade où 100% de la population aurait déjà perdu la vie 3 fois (même pas une égratinure), et surtout
à un happy end
, et c'est là que la note commence à baisser.
C'est l'un des rares films, à l'instar de Rogue One chez Star Wars, où l'on peut vraiment se permettre de virer au drame, surtout que l'ambiance et les autres films récents du MCU s'y prêtent. A la fin je voyais vraiment au moins Yelena mourir, ne serait-ce que pour expliquer le sacrifice de Natasha dans Endgame (elle n'a plus rien alors que Clint à sa famille). Mais non.
Pire que tout, la scène post-générique balaye les personnages dans la case Disney+ pour la série "Hawkeye" (on arrive à la note finale moyenne). Alors voilà, le but final de ce film a un très fort goût de publicité pour la plate-forme, et vu les enjeux en cours dans le MCU au cinéma, ça m'étonnerait que les personnages de ce film soient de taille pour y revenir...