Une journée comme une autre. Dans les bras de son amoureux, Sasha doit se lever pour aller bosser. Après une séquence à son travail muette et pourtant pleinement vivante, la jeune femme rentre chez elle. Sur le chemin du retour, elle s’écroule par terre. La mort arrive sans raison, elle est inaltérable et c’est ce qui fait son caractère si inquiétant.
Cette superbe représentation du deuil au cinéma s’avère être pudique, solaire, douce et douloureuse. S’étalant sur plusieurs années, le récit évite les écueils d’une nostalgie plombante pour laisser parler les images. Toujours baignées de lueurs chaleureuse et réconfortante, Sasha semble être matérialisée par ce halo de lumière discret, et pourtant si nécessaire.
La perte d’un proche ne se résout pas en une période définie. Ici, la sensation du temps qui passe se respire à chaque chapitre. Les personnages évoluent à leur rythme, sans forcer le dialogue s’ils n’ont rien à dire. Trop peu utilisé au cinéma, le silence est, dans Ce sentiment de l’été, à sa place. C’est à dire nécessaire. Le caractère infiniment petit de ces drames du quotidien se confronte avec la peinture de ces villes immenses. Paris, New-York, Berlin et autant de rues où il est possible de déambuler pour se perdre. Autant de chemins à parcourir avant de déposer les armes. Autant de souvenirs à se remémorer avant qu’ils ne disparaissent.
Il est amusant de voir que l’acteur Anders Danielsen Lie (incarnant le petit-ami de la défunte) et le réalisateur (Joaquim Trier) qui l’a employé pour son premier film (Oslo 31 août, stratosphérique) ont été attirés par le même sujet. Trier a en effet réalisé il y a deux mois le percutant Back Home, récit déchirant sur le décès d’une mère de famille. Avec un visage au teint brumeux, l’acteur norvégien nous désarme ici par sa capacité à tout dévoiler, sans jamais paraître dans le « jeu ».
Mais à l’heure où oser montrer que l’on a de la peine est quelque peu entrer dans les mœurs, comment survivre face à une telle perte ? Ce sentiment de l’été nous donne quelques ingrédients : faire l’amour, danser, méditer, boire, voyager. Tout ce que symbolise cette jeunesse contemporaine, se tenant par la main du début à la fin pour faire face.