On avait bien une idée, par le cinéma, de ce qu'étaient les mines terrestres, notamment par des scènes de soldats piégés ou encore par le biais du démineur romantique du remarquable film de Anthony Minghella, "Le patient anglais". Mais au milieu du chaos de la guerre où c'est la mort qui s'en sort le mieux, on se sent trop submergé par l'émotion, accroché à nos héros dans l'espoir qu'ils s'en sortent, pour focaliser sur le pourquoi du comment la mort survient…
Le film de Martin Zandvliet est d'un autre ordre, parce qu'il nous raconte une histoire que nous ignorions et qu'il alerte notre conscience. Pas seulement sur des faits vieux de sept décennies, mais aussi sur notre potentiel à faire preuve de discernement et d'humilité face au pire, et il y a toujours pire.
Un petit groupe de soldats en file indienne avançant à petits pas sous les hurlements, les insultes et les coups d'un autre soldat. Le film commence à peine que l'atmosphère est déjà insoutenable. Ceux en file indienne sont allemands, prisonniers de l'autre soldat, danois s'exprimant dans un allemand clair. Ils sont emmenés vers des plages où l'élimination de milliers de mines terrestres leur échoit. C'est donc sur ces quelques prisonniers âgés de moins de vingt ans, à bout de souffle, que la vengeance d'un pays, le Danemark, tombera.
Trois bicoques, des kilomètres de plages de sable meurtrier, une femme seule avec sa petite fille, un chien, trois mois. Le déminage de l'ensemble du périmètre va commencer. L'extrême jeunesse des protagonistes nous est rappelée au fil des scènes à travers le regard de leur geôlier, bien forcé de s'humaniser face à la situation pitoyable dont il est à la fois le bourreau et le témoin aussi conscient qu'impuissant devant l'inhumanité de ce jeu de roulette russe où leur vie est suspendue et dont on sait d'avance que peu s'en sortiront. Un film fort que la princesse Diana, par le combat qu'elle a mené contre les mines antipersonnels, aurait sûrement applaudi si elle n'avait été fauchée par son propre drame.