Durant une année, dans une petite ville de province qui devient station balnéaire en été, vivent cinq jeunes hommes comparés littéralement dans le titre du film à de gros veaux qui tètent encore leur mère alors qu'ils devraient être depuis longtemps sevrés. « Ils arrivent à la trentaine bien sonnée, en pérorant et en rabâchant leurs blagues de gamins, précise Fellini... Ce sont les chômeurs de la bourgeoisie, des chouchous à leur mémère. »
Ces cinq « vitelloni » sont Alberto, paresseux bon vivant, Leopoldo, poète raté certain d'un avenir talentueux, Riccardo, ténor amateur, Moraldo, le plus jeune d'entre eux, noctambule mélancolique. Le dernier, Fausto, a mis enceinte Sandra et est obligé de l'épouser. Marié, il ne renonce pas à sa vie de Don Juan. Devenu malgré lui vendeur magasinier dans une boutique d'objets pieux, il essaie de séduire la femme de son employeur… Deviendront-ils adultes ? C’est la question que l’on se pose tout le long du film. Malgré les coups de la vie, on les voie s’enferrer dans leur oisiveté et dés errance ou rentrer dans le rang pour satisfaire tout bonnement au carcan moral de l’Italie provinciale. Seul le plus jeune, Moraldo, mais le plus mature parvient à échapper à cette pauvre vie par la fuite vers Rome. Sans jamais juger, il aide ses amis sans compter mais aspire à une autre vie ; il est certainement aussi le narrateur du film mais aussi Fellini lui-même jeune. Ce dernier révéla une touche autobiographique dans ce film. Il est de plus issu de la ville de province où se déroule l’action, et son départ vers Rome marqua le début de sa carrière.
L'histoire du couple Sandra-Fausto elle-même ne représente pas le fil conducteur du film. Elle passe parfois au second plan et d'autres personnages comme Alberto ou Moraldo deviennent les protagonistes de séquences entières. Il s’agit en effet d’une histoire de copain et le but est de montrer que leurs vies va prendre un nouveau tournant durant cette année ; on ne peut rester éternellement des « vieux jeunes ».
Issu de la tradition néoréaliste italienne, Fellini décrit les réalités quotidiennes, sur un ton mélancolique et un rythme nonchalant. Un an après, il connaîtra la consécration avec La Strada après le Lion d’Argent pour celui-ci. Il s’évertue ici à décrire la société italienne dans sa globalité : le peuple comme le père de Fausto, les bourgeois comme la famille de Sandra, les paysans, le monde ouvrier,…
Et puis surtout il montre un tissu social réparti en deux groupes autour de la morale ; d'un côté, les parents, les personnes établies, Sandra ; de l'autre, les « vitelloni ». Cependant, ces deux groupes reconnaissent les mêmes valeurs morales, soit en les respectant, soit en les transgressant de façon honteuse. Ces valeurs sont le travail, la famille et l'Église. Tout le film exprime ce qu'est la morale catholique à l'italienne : on connaît ses devoirs, mais on ne les accomplit pas toujours ; on commet des péchés ; on vit ensuite dans le repentir ; on subit les punitions, dans la douleur ; puis on est absout et tout le monde se réconcilie, afin que tout recommence. Partir dans ce contexte est la seule façon d’y échapper.
Le tout n’est pas très passionnant hormis l’étude sociologique d’une époque. La musique de Nino Rota apporte tout de même de l’ampleur au film.