Avec plus de deux millions d'entrées au box-office français, ce regard à la fois comique et tragique porté sur le conflit de la Première Guerre mondiale offre à Albert Dupontel son second meilleur succès au cinéma.
Adapté du roman homonyme de Pierre Lemaître, prix Goncourt 2013, Au revoir là-haut nous entraîne dans le Paris des années folles, aux côtés de deux anciens Poilus mettant en oeuvre une vaste opération d'escroquerie aux monuments aux morts. Mais les pires escrocs ne sont pas forcément ceux que l'on pense, en témoignent un lieutenant reconverti particulièrement détestable et un directeur d'entreprise ingrat et méprisant.
Récompensé par cinq Césars lors de la cérémonie 2018, faisant de son oeuvre l'une des plus nommées et consacrées de la soirée, l’acariâtre Albert Dupontel offre une adaptation historique imprégnée de nombreuses tortures dans les vies des personnages. Bien que l'aspect comique ne manque pas, présentant l'histoire dans une perspective parfois un peu ridicule et fantaisiste, on s'attache assez vite aux difficultés du couple amical inséparable. Toutes deux victimes, l'une se retrouvant embarquée dans un projet dont elle ne maîtrise rien, l'autre à la gueule cassée, contrainte de se cacher pour échapper aux yeux du monde et à la brutalité d'un père intolérant, ces personnalités fragiles retirent quand même de leur entente une volonté exemplaire.
Parmi les trophées obtenus par cette réalisation, ceux des meilleurs décors et des meilleurs costumes sont largement mérités, motivés par des reconstitutions particulièrement documentées et fidèles à la réalité de cette époque de naïveté. Le César de la meilleure photographie témoigne, quant à lui, de prises de vues osées mais réussies.
Enfin, en tête d'affiche, Albert Dupontel endosse le rôle principal, bien qu'il ne se l'était pas destiné durant l'élaboration du projet. Mais la fatigue et le refus du principal candidat l'a contraint, malgré lui, à se plonger dans la peau du soldat Maillard, ce qui ne l'empêche pas de nous présenter une prestation convaincante. Il en est de même de son acolyte Nahuel Pérez Biscayart, lauréat la même année du César du meilleur espoir masculin, mais dans une autre production. Bien qu'il ne puisse pas s'appuyer sur les atouts de la voix et du visage pour interpréter son rôle, sa gestuelle et son jeu de scène sont finement travaillés et auraient mérité davantage de reconnaissance. Toujours concernant le casting, Laurent Lafitte approche parfaitement le côté exécrable et détestable de son personnage, et la petite Héloïse Balster, interprète de la gamine Louise, surprend par son mélange subtil entre innocence et maturité.
En guise de conclusion, bien que le scénario du film reste plutôt fidèle au roman original et que les décors et costumes offrent un rendu visuel très immersif, l'ensemble souffre d'une trop grande légèreté en tentant d'aborder des sujets graves et traités de meilleurs manières ailleurs. Mais cette adaptation mérite toutefois d'être visionnée, tant pour l'empathie que l'on ressent aux souffrances des personnages que pour les nombreux atouts dans la mise en scène.