Même si l'impression d'ensemble reste éminemment positive, je ne peux m'empêcher d'osciller légèrement entre deux sentiments après le visionnage de cette « Atalante ». D'un côté, je n'ai pas été totalement sensible à ce cinéma au rythme singulier, ne racontant finalement pas tant de choses pendant 80 minutes, le regard sur le couple ayant, fort heureusement, évolué au fil des décennies (je le rappelle au cas où : frapper sa femme, c'est mal et celle-ci n'est nullement obligée de vous pardonner!!). Du coup, j'avoue que
ces retrouvailles presque passionnées
m'ont un peu gêné, aussi élégamment amenées soient-elles. En revanche, l'univers créé par le talentueux et parti beaucoup trop tôt Jean Vigo est charmant. Que ce soit cette dimension rêvée à travers quelques images magnifiques, des idées incroyables
(les tatouages de Michel Simon)
, cette vision merveilleuse d'un Paris pouvant pourtant prendre des airs inquiétants, nul doute qu'il y a de quoi avoir régulièrement le sourire durant cette balade aussi bien sur mer que sur terre. Dommage que la copie, pourtant restaurée deux fois, ne rende probablement pas hommage au travail formel et sonore effectué par le jeune réalisateur, ce qui n'empêche pas cette ambiance au frontière du muet d'être constamment d'une grande délicatesse et sensibilité, à l'image de la très séduisante Dita Parlo, éclipsant aisément un Jean Dasté juste convenable. Belle bande-originale, toujours dans une logique chaleureuse et humaine, ce qui n'empêche nullement une profonde mélancolie à bien des égards, notamment dans ce regard posé parfois sur la complexité des sentiments. À défaut de rentrer dans mon panthéon personnel, « L'Atalante » n'a pas usurpé sa place parmi les grands classiques du cinéma français et mérite, encore aujourd'hui, toute notre considération.