The Beast est adapté du best-seller L'Homme du soir de Mo Hayder (éditions Presses de la Cité et Pocket, pour la version française). Hans Herbots explique comment il en est venu à s'engager dans ce projet : "J’étais en plein tournage de la série télé The Spiral à Copenhague quand le producteur Peter Bouckaert m’a appelé pour me demander de lire ce livre dont il avait les droits. Je sais que c’est un peu cliché, mais je n’ai pas pu le lâcher. J’ai été rapidement fasciné par son sens du storytelling. Il y avait la matière pour faire un bon film."
Si le livre avait pour cadre la ville de Londres, The Beast transpose l’action à Anvers, ville la plus peuplée de Belgique avec plus de 500 000 habitants. Cela étant, ce choix n'est pas clairement marqué dans le film qui donne l'impression, en dehors de la langue ou les noms à consonance flamande, qu'il peut se dérouler dans d’autres pays européens. "Dans un premier temps j’avais pensé tourner en Angleterre puisque c’était le lieu du roman. Mais on a eu du mal à trouver des financements pour cela. A l’arrivée on s’est rendu compte que le choix de la Belgique, vu l’histoire récente du pays, collait sans doute mieux à l’atmosphère du scénario", se souvient Hans Herbots.
A l'instar des films Millénium adaptés des romans de Stieg Larsson ou encore des longs métrages belges comme Bullhead ou Waste Land, The Beast s'inscrit dans le récent registre du film noir européen. Hans Herbots développe : "Ça a donné lieu à un renouveau du film noir qui s’est émancipé de ce qui se fait dans le cinéma américain : il est beaucoup plus audacieux dans les thèmes, la psychologie va beaucoup plus en profondeur sur ces terrains. On peut aujourd’hui y aborder des sujets douloureux, voire tabous. Peut-être parce que ces dernières années, l’Europe fait face à une réalité assez sombre."
Herbots voit d'ailleurs cette évolution cinématographique comme à mettre en parallèle avec l’accueil très positif du public envers certaines séries télévisées qui ont démontré à quel point des cinéastes pouvaient aborder des sujets plus sombres.
The Beast est le film de Hans Herbots qui a pour le moment provoqué le plus de réactions positives à l'international : de par son sujet difficile bien sûr, mais aussi de par l'esthétique qui renforce le propos.
Difficile de ne pas faire le rapprochement entre The Beast et l'affaire Marc Dutroux. Par rapport à cela, Hans Herbots a cherché à être particulièrement prudent pour ne pas donner forme à un film centré sur cette affaire tristement célèbre. D'ailleurs, les crimes du film n'ont pas grand chose à voir avec ceux de Dutroux.
The Beast utilise quelques images brutales mais sans tomber dans un excès de violence graphique. Le cinéaste a préféré mettre l'accent sur l'installation d'une atmosphère angoissante plutôt que de représenter la violence dans son aspect le plus objectif : "Le film vient de sortir en Angleterre après avoir été projeté il y a quelques mois en festival. A l’époque, certains journalistes là-bas l’avaient trouvé visuellement très violent. Mais en le revoyant pour sa sortie, ils se sont aperçus qu’il est beaucoup moins graphique, plus suggestif que ce qu’ils pensaient. (...) D’un autre côté, je voulais que le public se retrouve dans le même état de colère que Nick. Et pour ça, il fallait malgré tout passer par certaines images, mais en trouvant le bon dosage."
Pour renforcer l'atmosphère angoissante de l'ensemble, Hans Herbots a voulu rester authentique et s'est ainsi inspiré de l'esthétique du documentaire. Mais ce n'est pas tout : "J’aime aussi le travail sur l’image qui donne un vrai côté cinéma; quand la lumière, la photo contribuent à raconter l’histoire, et à donner une ambiance. J’ai donc essayé de lier les deux dans The Beast. Nous travaillions aux heures entre chien et loup, juste avant la tombée de la nuit, quand la lumière commence à disparaitre, que les couleurs s’atténuent. Cette part crépusculaire collait avec le sujet du film. On a juste renforcé cette ambiance jusqu’à choisir les costumes dans des teintes de marron, de bleu sombre."
Contrairement à ses précédents films qui portaient un regard assez optimiste sur les personnages, The Beast entretient une noirceur jusqu’au bout. Cependant, Hans Herbots voit quand même dans son nouveau film un aspect positif : le fait que le personnage principal puisse avoir une chance de surmonter son traumatisme d'enfance et ainsi aller de l'avant.