L'Ange Blessé est le second volet d'une trilogie où l'adolescence est abordée comme le prisme privilégié à travers lequel Emir Baigazin traite des conflits intérieurs des hommes. Le metteur en scène précise :
"L’intériorité d'un jeune de 13 ans agit comme un verre grossissant. Chacun des personnages de L'Ange Blessé pourrait reprendre à son compte cette phrase tirée de Sa majesté des mouches de William Golding : « Puisque nous savons que personne ne viendra nous chercher et que nous allons devoir vivre ici pour toujours, alors nous ne pouvons plus nous comporter comme des enfants ». L’Ange Blessé est un film sur la perte de l’innocence. Quelque chose s’est brisé dans la conscience de ces adolescents ; un nouveau système de valeurs apparaît."
Avant d'être un film, L'Ange Blessé est d'abord une peinture de Hugo Simberg. Emir Baigazin raconte que c'est au moment où il traversait une période difficile qu'il est tombé sur des reproductions des oeuvres de Hugo Simberg. Parmi elles, le tableau L'Ange blessé représentait pour le réalisateur la quintessence de ce qu'il essayait de développer avec ces quatre histoires de son film. Il confie :
"Pour le dire autrement, chacun de mes personnages pourrait être cet ange que portent les autres enfants dans le tableau. Par ailleurs, j’ai finalement utilisé La Guirlande de vie, la fresque de Simberg qui se trouve dans la cathédrale de Tampere en Finlande. Elle représente 13 garçons comme autant d'apôtres qui transportent un arbre de vie. C’est ce que vous pouvez voir à la fin de chaque partie, lorsque le titre du chapitre apparait."
Emir Baigazin a choisi cette structure en quatre parties distinctes parce que mélanger les histoires et les personnages aurait été pour lui une solution de facilité. Le cinéaste développe : "J’ai préféré construire l’unité du récit de façon plus souterraine, en développant davantage les rapports entre les émotions. Je ne voulais pas que le film se résume à une histoire linéaire, mais que l'idée se développe dans un mouvement, en allant d’une histoire à l'autre. La dernière des quatre histoires doit agir comme un verdict ou comme une solution à celles qui la précèdent."
Emir Baigazin a voulu ancrer ces quatre histoires dans les années 1990 qui ont été marquées par une crise profonde pour le Kazakhstan : l’électricité était coupée régulièrement, les orphelinats étaient surpeuplés, à l’heure du couvre-feu la rue devenait un petit théâtre de criminalité, etc. Un cadre spatio-temporel idéal pour dépeindre ces personnages réalisant qu’ils ont fait les mauvais choix.
Emir Baigazin avait déjà imaginé les quatre histoires de L'Ange Blessé pendant le montage de Leçons d'Harmonie, son premier long métrage qui avait remporté l’Ours d’Argent de la Meilleure Contribution Artistique au festival de Berlin 2013.