Alors que les villes étasuniennes ressemblent de plus en plus à des bidonvilles en 2045, la plupart des habitants ont tout de même suffisamment de ressources pour se payer un casque de réalité virtuelle afin de s'échapper dans un monde numérique partagé par tous appelé OASIS. OASIS est comme un bon gros jeu vidéo au sein duquel chacun participe grâce à un avatar. Évidemment, il y a un super vilain qui veut s'approprier totalement le jeu (qui doit générer un cash dingue dans le monde réel – on ne sait pas trop comment) – ce qui, suggère le film, s'apparenterait à une sorte de fin de monde. Il s'agit donc de l'en empêcher. Quoi de mieux lors qu'un jeune geek un peu looser, très malin et féru de "culture" des jeux vidéo (depuis les premiers Atari – ce qui est un exploit vu son âge), pour contrecarrer le méchant ? Bien sûr, il rencontrera une sympathique petite bande de rebelles, et trouvera même l'amour.
Blindé à outrances de référence à la "culture" du divertissement visuel (cinéma et jeux vidéo), les références fusent en permanence au point qu'il est difficile de toutes les saisir. La Doloréane d'Emet Brown, le Rosebud de Welles, une course folle de voiture directement piquée eu remake du Death Race 2000 de Corman par PWS Anderson (2008)… Mais qui aura reconnu l'incantation (ridicule) de Merlin dans l'Excalibur de John Boorman (1981), nécessaire pour actionner le bouclier de la forteresse maléfique de la planète Doom ? On a connu un hommage semblable avec le Klatou verata niktou prononcé par Ash dans Evil dead 3, tout droit tiré du "jour où la terre s'arrêta" de Robert Wise en 1951. Mais Sam Raimi était drôle. Le gros problème avec ce film de Spielberg, c'est que le second degré est absent. Le ton est grave. Sauver le jeu est plus important que sauver le monde réel, au bord de la ruine. Le monde réel… où l'emprisonnement et même la justice sont confiés à une société privée (celle du méchant bien sûr), où les gens préfèrent dilapider leur maigres revenus dans des gadgets leur permettant d'être plus performants dans le jeu… où des hordes de zombies se promènent en gesticulant dans la rue, les yeux couverts de leur casque de réalité virtuelle. Aucune véritable condamnation de tout ceci. Par contre, le jeu est si excitant: d'un réalisme bluffant, votre avatar peut en gros tout se permettre. Vous tuez des gens par dizaines, et les corps démembrés des avatars saignent des flots de pièces d'or que vous aspirez pour accroitre votre richesse et votre pouvoir. Cétipabo ?
Alors à la fin,
des flics surgissent quand même (il y en a encore des vrais, apparemment) pour mettre le méchant en prison, juste avant qu'il se fasse lyncher et
, tenez-vous bien, le gentil (qui a gagné) instaure une nouvelle règle et débranche le jeu tous les mardis et jeudis pour obliger les gens à passer un peu de temps dans le monde réel. On croît rêver. Ne vous méprenez pas, ce film est très important car c'est un révélateur magistral: qu'autant de critiques et qu'une part si importante de son public soit aussi prompte à l'encenser est véritablement inquiétant, car on peut y voir le quasi renoncement de notre société à vouloir remédier aux catastrophes écologiques et sociales en pleine expansion… dans le monde réel.