Je suis plutôt fan de l’univers de Shane Black, scénariste culte des années 80 et 90 (à qui on doit "L’Arme Fatale", "Le dernier samaritain" et "Last Action Hero") qui sait raconter le Los Angeles hollywoodien des stars comme personne. On lui doit, également, l’excellent "Kiss Kiss Bang Bang", qui avait remis Robert Downey Jr sur orbite (avant l’explosion "Iron Man" dont il signera, du reste, le troisième et sous-estimé volet). J’attendais, donc, avec impatience de découvrir ce "The Nice Guys", qui s’annonçait, " 100% Shane Black" avec, outre Los Angeles en toile de fond, le duo mal assorti façon buddy movie de la grande époque, le cinéma, les putes, la drogue, le tout dans une ambiance mi-polar, mi comédie décalée. Au final, je dois reconnaître que j’ai été un peu déçu… Des spectateurs peu rompus à l’univers du réalisateur parviendront peut-être à être surpris par le film mais, pour les fans, difficile de trouver son compte tant Black recycle son style sans le renouveler et, surtout, sans parvenir à trouver le ton juste. Le risque était pourtant grand de se planter au vu de l’intrigue proposé qui lorgne ouvertement du côté de l’illustre prédécesseur "Kiss Kiss Bang Bang" (on retrouve le duo de bras cassés qui enquête, l’intrigue pleine de faux-semblants, les fêtes de producteurs…). Si le réalisateur avait un tant soit peu changé la structure de son histoire, peut-être que cette impression de déjà vu se serait estompée d’elle-même. Il a malheureusement préféré miser sur ses acquis. Résultat : la mise en scène est attendue, le coté vintage des années 70 est assez peu exploité et les personnages, aussi décalés soient-ils, manquent d’originalité (Russell Crowe en brute épaisse, Ryan Gosling en poissard, Matt Boomer en tueur monolithique à l’arrivée tardive, Kim Basinger en guest de luxe sans aspérité…) à l’exception notable de la gamine campée par Angourie Rice, épatante de maturité et, surtout, promis à un bel avenir au cours des prochaines années. Mais le défaut principal du film me parait être son intrigue, inutilement alambiqué, au point de perdre un peu le spectateur en cours de route. Pour autant, "The Nice Guys" peut se targuer d’une lecture méta qui n’est pas inintéressante puisque l’intrigue traite
d’un film porno produit pour dénoncer un scandale mêlant magouilles politique et santé publique bien réel (à savoir la pollution engendrés par les constructeurs de voiture, soit un sujet qui résonne tout particulièrement en ce moment)
… qu’il dénonce, du coup, par la même occasion. Black avait, d’ailleurs, là une belle occasion de se sortir son épingle du jeu… mais il en va pas suffisamment au bout de l’idée et préfère se concentrer sur l’aspect comique du film, au point d’en faire trop par moment (comme lorsqu’il fait crier Ryan Gosling façon comédie française bas de plafond). Ces critiques étant faites, "The Nice Guys" reste un film agréable riche en très bons moments décalés et souvent drôle. Il n’en demeure pas moins que ce traitement comique ressemble parfois à un cache-misère dissimulant le manque de structure de l’intrigue et la manque de renouvellement de son auteur. Il manque, peut-être aussi une dramaturgie un peu plus forte (ou plus frontale) qui aurait moins désamorcé la tension à certains moments (une fois encore, la comparaison avec "Kiss Kiss Bang Bang" fait mal). Un bon petit film sympa donc, avec la plus-value du savoir-faire de son réalisateur… mais pas plus.