Après “Whiplash”, court-métrage puis long-métrage, film parfait dans son propos et sa simplicité, Damien Chazelle tente de réaliser son rêve de comédie musicale, s’inspirant surtout de Jacques Demy avec “Les demoiselles de Rochefort”, mais en beaucoup moins bien, car il cède au travers coutumier de vouloir mêler de l’émotion à une histoire qui pouvait fort bien s’en passer.
Pourtant, le film commence superbement, par une longue séquence de danse contemporaine, tout à fait dans le style de Demy, avec cette difficulté supplémentaire qu’elle a été filmée sur une portion d’autoroute, le Century Freeway I-105, que la police de Los Angeles a accepté de fermer pour la circonstance, comme elle l’avait été pour le film “Speed” en 1995. Mais, si la chorégraphie est bonne, la musique m’a semblé un cran au-dessous.
L’histoire est très pudique, puisqu’elle ne comporte aucune scène d’amour entre les deux personnages, qui, d’ailleurs,
ne feront pas leur vie ensemble, sinon en rêve, après que Mia ait épousé un autre homme et en ait eu un enfant. La scène où elle retrouve par hasard son ex-amoureux dans le club de jazz qu’il a fondé et où elle (ou lui ?) rêve qu’ils reprennent leur histoire passée est entièrement imaginée
.
Tout se passe à Los Angeles, comme le suggère le titre (La = L.A. = Los Angeles), où vivent et végètent Sebastian et Mia. Lui est pianiste de jazz, elle est actrice débutante et qui rate toutes ses auditions. Bien entendu, on devine dès le début qu’ils vont réussir et devenir vedettes, car c’est la règle au paradis du “rêve américain” [sic]. Aucune surprise, donc. Et l’animosité qu’ils partagent au début va évidemment se transformer en amour, toujours selon les canons en vigueur au pays du rêve calibré, ce qui se concrétise par une scène assez nunuche, faute de goût filmée dans l’observatoire Griffith qui avait servi au film de Nicholas Ray “Rebel without a cause” (en français, “La fureur de vivre”, avec
le navrant
James Dean), avec effet spécial numérique figurant une danse dans un ciel étoilé...
C’est très nostalgique, bourré de références cinématographiques assez obsessionnelles (“Casablanca”, “Rebel without a cause”), et se conclut par un épilogue qui remet enfin au premier plan la chorégraphie qui manque tant à ce film, que pourtant on nous a vendu comme une comédie musicale. Bref, entre deux séquences de comédie musicale qui seules valent le dérangement, un mélo assez pesant, prévisible et ennuyeux. Je pense que Spielberg, qui avait prouvé dans “1941” et dans “Indiana Jones and the temple of doom” ses capacités dans ce domaine – où il montrait davantage d’énergie –, aurait été le mieux placé pour ressusciter le genre, qui va demeurer moribond, en dépit des cris d’admiration de la critique unanime.