Vu VALLEY OF LOVE de Guillaume Nicloux avec Huppert et Depardieu, amputés de leur prénom au générique et sur l'affiche tant leur patronyme exprime à lui tout seul la puissance de leur légende respective et commune. Soit deux stars de cinéma, Isabelle et Gérard, qui se retrouvent dans la Vallée de la Mort pour répondre à une injonction écrite de leur fils, suicidé 6 mois plus tôt. S'ils obéissent à sa requête, il promet de réapparaître… Très moyennement crédule, Gérard fait de la résistance, tandis qu'Isabelle, dévastée par le geste de son fils qu'elle ne comprend pas, est prête à croire à l'impossible. Ces deux-là se sont aimés follement ("Quand on a vraiment aimé quelqu'un, on l'aime pour toujours, quelle que soit l'issue", admet Isabelle) mais le rendez-vous n'est pas de tout repos. Règlements de compte, malentendus, perception différente des événements… elle le cherche, le provoque, il l'observe, la surveille et la protège. On pouvait craindre deux numéros d'acteur, on assiste au contraire à une joute pleine de pudeur et d'émotion. Ils ne "jouent" pas, ils sont tout simplement eux-mêmes et c'est bouleversant. J'y ai cru de bout en bout, j'ai cru à leur amour, à leur détresse, à leur chagrin et à leur passé. Sans jamais jouer le deuil, ils sont Isabelle et Gérard, parents d'un enfant parti trop tôt. Bien sûr, l'ombre de Guillaume plane… Il n'ont besoin de rien pour incarner ce désespoir, sauf de se bouffer des yeux et de dire leur texte. La chaleur écrasante, troisième personnage du film (et non des moindres), s'invite à chaque scène et influe sur l'humeur, le rythme et l'ambiance. Gérard, énôôôôrme, transpire tant qu'il peut, Isabelle si fluette, pleure en silence. Deux façons d'être au monde et d'exprimer l'indicible. Deux monstres sacrés, liquides, en pleine possession de leur art. Cette vallée de l'amour et de la mort vaut assurément le détour cet été. C'est fantastique, dans tous les sens du terme.