C’est très indécis que je me suis pointé hier soir au cinéma, je n’avais en fait pas la moindre idée de l’actualité en la matière. Planté devant le programme de la soirée, j’hésite : « Alita, battle angel » et « us » film d’horreur pédagogique, me paraissent des choix conformes à mes goûts. Mais finalement, pourquoi ne pas m’arracher à mon confort, me soustraire à l’ordinaire? Je pourrais m’introduire à un cinéma plus écrit, l’œuvre d’une vrai dramaturge , quelqu’un qui recueille largement les suffrages de la bobocratie citadine ?
Ce sera donc le dernier Dolan. Finalement, pour n’avoir jamais vu le moindre de ses films, je n’en ai entendu dire que des éloges. Il est temps d’en vérifier les mérites. Deux heures plus tard, je sors de la salle. Bilan :
Voyons voir si j’ai bien compris (no spoil) : Un jeune acteur en passe d’accéder aux étages les plus glorieux de la hiérarchie notoriétale (créons du vocabulaire), dissimule son homosexualité par crainte que cet aspect de son identité ne nuise à son rêve de succès. Cette discipline est une automutilation constante, il s’isole et confie son amertume à un jeune de ses fans,acteur lui aussi (ou désireux de le devenir), au travers d’ une relation épistolaire (oui, il fait ça, aussi étonnant que ça puisse paraître). C’est le même gamin qui, quelques années après le suicide de son mentor, décidera de publier leurs échanges et deviendra par là même le narrateur du récit qui nous est livré.
Alors si le pitch parait comme ça, de but en blanc, vraiment peu crédible, devant l’écran on se pose moins de question. Le mérite en revient au casting qui globalement livre une performance très tenue, mention spéciale au jeune Jacob Tremblay, d’une subtilité peu attendue. Mieux valait ne pas se louper par ailleurs, puisque Dolan fait preuve d’une affection toute particulière pour les gros plans sur les visages. L’objectif est sans doute de mieux partager l’émotion des personnages. Il y a d’ailleurs quelque chose d’un peu mièvre dans ce film, mais ça ne dégouline pas, et je dois dire que dans l’ensemble, l’empathie fonctionne plutôt. Le sujet des difficultés à assumer sa sexualité est traité avec une immense pudeur qui m’a autorisé, malgré mon hétérosexualité bête et radicale, à m’identifier au personnage. Tout compte fait, concernant une quelconque autre part de mon identité, j’aurais pu connaitre les mêmes tourments.
Dans l’ensemble, il est bien d’avoir su me pousser sans contrainte à me pencher sur des problématiques de cet ordre, moi qui m’en tiens généralement éloigné. Pour autant, si l’émotion passe bien, j’aurais apprécié plus de détails sur les conditions d’existence qui ont poussé le Donovan au fond du gouffre. Au-delà du sensible et de l’intuitif, un peu de rationnel aurait été utile. L’important dans tout ça : je ne me suis pas emmerdé. Certains procédés de narration plutôt habiles ont contribué à soutenir mon attention. Rien que pour cette raison, Xavier, le jury t’accorde une mention. Bon boulot. C’est propre, ça tient debout et surtout, ça atteint ses objectifs.