Depuis 300, Gerard Butler s'enferme toujours plus dans des rôles de bourrins inhérents à des films de peu de qualité; Gods of Egypt, Ultimate Game, Le Chantage, La Chute de la Maison Blanche, La Chute de Londres, La Chute de l'Air Force One, La Chute de mes Couilles en Ski, autant de mauvais films qui font que sa carrière stagne comme jamais.
Arrive Criminal Squad, drôle d'union entre Heat et Gangster Squad, à mi-chemin entre la finesse explosive de Michael Mann et le bourrin volontairement badass en apparence de Ruben Fleischer. C'est à Christian Gudegast qu'incombe (et décombe) la tâche de produire, scénariser et réaliser le film avec Butler en rôle titre; déjà à l'oeuvre sur les intrigues d'Un Homme à part et La Chute de Londres, il retrouve ici l'actioner bourrin du pauvre, le Léonidas perdu dans les méandres du mauvais divertissement et lui offrant un rôle sur-mesure, donne à ce bon vieux Seth Butler la possibilité de nager dans son rôle de flic alcoolique et terriblement caricatural.
Seulement, cette personnalité d'homme viril à l'excès lui va à ravir : habitué à jouer des rôles sombres d'hommes torturés prêts à tout pour se venger ou rétablir la justice, c'est qu'il ne sort pas des sentiers battus et nous livre une prestation banale bien qu'efficace, mais largement plus crédible que ce qu'il pouvait faire dans le registre comique (on se souvient de l'abominable Chasseur de primes). On y croit rapidement, on s'y attache finalement; parce qu'il a cette petite étincelle de vécu dans son jeu, ce brin de sincérité qui fait qu'en oubliant le cahier des charges respecté de la personnalité du mauvais flic, on y adhère presque totalement.
Butler nous offre une performance touchante, entre la dureté de caractère et la faiblesse des vices (de l'alcool à la cigarette, forcément), dans un conflit permanent avec un certain Pablo Schreiber dont le charisme se résume à sa nervosité destructrice. Une fois de plus, 50. Cent tiendra le rôle d'un gangsta plutôt discret, d'un personnage tout en retenue qui saura quand se battre et quand développer sa personnalité, tout aussi crédible que les autres acteurs de second-rôles entourant ce trio de gueules plus célèbres.
L'on n'y comptera aucune erreur de casting, pas même de mise en scène : efficace, elle favorise le réalisme à l'action, développant une heure et demie entière de préparations de casse pour mieux tout ravager durant son affrontement final, violent et cru, filmé à la manière d'un reportage qui aurait mal tourné. Porté par ses scènes d'action fantastiques et d'une puissance rarement vue depuis les John Wick, The Raid et autres Tarantino, Criminal Squad se repose surtout sur une bande-son d'extrême qualité aux bruitages de coups de feu si proches de la réalité qu'on se croirait en plein règlement de compte. Détail qu'il est important de souligner au jour où le réalisme des combats se perd au profit de la superficialité des effets spéciaux et autres explosions à profusion mais qui n'ont, finalement, ni queue ni tête.
Ni trop lent ni trop rushé, Criminal Squad tient pour fierter de développer ses personnages dans leur quotidien, leurs rapports entre eux, avec leur famille ou leurs enfants, le tout jusqu'à parvenir à ce degrés de liens fraternels en escouade rarement réussis; si Rogue One avait échoué ce sentiment de cohésion profonde, on retiendra pour référence l'équipe de mercenaires indestructibles de Predator ou les braqueurs de Point Break, sûrement plus proches de ce film ci.
Parce qu'au final, on ne souhaite la victoire d'aucun des camps; s'il est des excès du côté des braqueurs de banque, il y aura tout autant d'écarts moraux pour ces flics type "incorruptibles" de De Palma, et qui se montreront peut-être trop dur pour l'être vraiment. Là est le problème du film : à trop vouloir montrer au spectateur qu'il est badass, dur et violent, une partie du public pourra finalement ne plus y croire et trouver l'oeuvre chip, surjouée, loin de la sincérité d'un Nice Guys ou d'un Sin City.
Un détail d'autant plus surprenant que le film, désirant éviter tout manichéisme, tombe malencontreusement dans une sur-représentation de la violence et de la virilité de tous ces frères d'armes, à ce point forcée qu'on en vient à se lasser des quelques passages de démonstration de force hors combat. C'est bourrin, certes, primaire, même, mais l'on demandait un peu plus de réflexion et de finesse sur ce point.
Quand on décide de privilégier la réflexion à l'action, qu'on choisit d'exposer tout un plan d'une heure et demi sans combat (alors qu'on ne demandait que ça pour un tel film), l'on ne peut se contenter d'être uniquement bourrin, de toujours foncer dans le tas en ce qui concerne le traitement des thèmes abordés et de la psychologie de ses personnages. Un drôle de mélange entre intelligence et bêtise s'y profile, comme si Criminal Squad ne savait pas s'il devait être Docteur Jekyll ou Mister Hyde. Et même si le coche n'est pas raté, on regrette finalement que l'oeuvre n'aie jamais trouvé sa réelle personnalité, à défaut de nous en mettre plein la vue dans un climax dur et passionnant.