Avoir un reboot de la saga Power Rangers en 2017, et qui est en plus parti pour avoir plusieurs suites, à quelque chose de très bizarre mais au final de pas si surprenant. On avait déjà eu la même réaction lorsque les studios américains se sont attaqués à G.I. Joe, Transformers puis les Ninja Turtles. Toute idée pour faire de l'argent est bonne à prendre et quoi de mieux pour capitaliser sur une fibre nostalgique avec une marque qui a bercé l'enfance de toute une génération, qui elle même emmènera ses enfants pour que cela touche une nouvelle génération et ainsi la marque pourra prospérer. Pourtant mis à par Transformers qui bénéficie du savoir-faire de Michael Bay et qui a su se montrer correct malgré des inégalités, ce genre de films touchent généralement le fond de la production blockbusters hollywoodiennes. Mais l'improbabilité de ces projets l'emportent toujours et on n'y va en espérant retrouver le frisson d'antan et en espérant pouvoir y trouver une pépite de fun. Ce qui nous amène à ce nouveau Power Rangers, énième projet de sa catégorie qui brille par son absence d'originalité.
Le film est confié à Dean Israelite, qui avait un peu fait parler de lui en 2015 avec son premier film Project Almanac, qui avait surtout visé un public adolescent étant une version ratée du Chronicles de Josh Trank. Ici il reste donc dans son genre de prédilection, à savoir la science-fiction pour teenagers et le film va souffrir de tout les défauts possibles des films de teenagers. Mis à part les 15 dernières minutes et les quelques passages avec la méchante, à aucun moment on aura le sentiment d'être face à un Power Rangers. Pépite de kitsch des années 90, qui brillait surtout pour être un succulent délire sans la moindre retenue, ici on perd toute cette sève pour un produit beaucoup trop sage et générique. Vouloir faire une approche sérieuse pour ses personnages est un contresens catastrophique dont le film ne se remettra jamais, loupant son vrai potentiel pour n'être qu'un drame adolescent mièvre et sans profondeur. Ici les personnages principaux sont des individus torturés et le film passe en revue de manière non subtil tout les clichés possibles de l'adolescence. Entre le fils prodigue qui fuit ses responsabilités, l'autiste ultra intelligent qui se fait maltraité à l'école, la lesbienne incomprise par sa famille puritaine, la fille du lycée superficielle qui se remet en cause après une erreur commise et le rebelle bad boy qui est comme ça car sa maman est malade. On va les entendre se plaindre sans la moindre finesse et sans la moindre profondeur à leur trauma pendant la quasi-totalité du film.
L'écriture n'est qu'un amas de stéréotypes qu'elle prend en plus beaucoup trop au sérieux et se donne beaucoup trop de forme dans un côté sombre et faussement épique qu'elle sabote souvent les tentatives de fun qui aurait dû être le cœur de Power Rangers. Les scènes avec la méchante donne donc souvent l'impression de sortir de nulle part et l'hilarité qui en découle en est souvent amoindrit. Le final qui aurait dû être l'explosion de délire fonctionne aussi en demi-teinte, car même si certaines pépites se trouve ici et là, on se retrouve face à une séquence qui dénote et ne trouve pas sa place dans les intentions initiales de ce Power Rangers. Surtout qu'elle n'est pas aidé par la mise en scène sans envergure de Dean Israelite qui se montre beaucoup trop sage et offre des séquences d'actions molles par leur statisme et n'arrive jamais à iconiser ses personnages. Ses meilleurs idées seront là en première partie de film, lors d'une course poursuite filmée en plan séquence ou encore lors de la découverte du vaisseau spatial de Zordon. D'ailleurs la réalisation lorgne beaucoup du côté des productions Marvel, la photographie y est générique, la musique ne marque pas les esprits et mise avant tout sur les hit qui plaisent aux ados tandis que les effets spéciaux sont pour la plupart franchement raté. Ça à le mérite d'ajouter un peu de kitsch à l'ensemble mais vu les intentions du film, cela n'est clairement pas volontaire.
Mais ce qui dérange vraiment dans ce Power Rangers, c'est la manière dont il s'emploie à représenter la jeunesse actuelle. Même si il l'enrobe avec un message d'espoir et de solidarité, il prend à la légère des sujets graves comme le harcèlement, le revenge porn ou encore les troubles du développements humains. Ici l'autiste de la bande ne sert que de comic relief et jamais le film ne le prendra au sérieux jusqu'à ce que le film oublie totalement sa condition une fois qu'il a ses pouvoirs alors qu'il avait insisté sans finesse sur ça juste avant. L'écriture se montre donc globalement aléatoire et inerte notamment dans les relations du groupe qui ne sont jamais convaincantes et malgré ses tentatives, le film n'arrive jamais à leur donner la quelconque épaisseur. Ce n'est pas non plus aidé par un casting en déficit de charisme et de personnalités. Hormis Elizabeth Banks qui s'amuse très clairement dans son cabotinage over the top qui est digne d'un méchant Power Rangers, elle est d'ailleurs la seule à avoir conscience dans quel film elle joue, les autres oscille entre le passable et le mauvais. Bryan Cranston n'est là que pour cachetonner et rappeler qu'il avait commencé sa carrière dans un petit rôle dans la série de 93 tandis que Dacre Montgomery s'en sort encore pas trop mal dans son rôle de leader sans grand relief ainsi que Naomi Scott qui est plutôt convaincante en Ranger Rose. Par contre, RJ Cyler est insupportable en sidekick rigolo, Becky G force beaucoup trop le rôle de la fille distante qu'elle est effacée et jamais convaincante alors que la palme du mauvais acteur revient à Ludi Lin qui donne une leçon de surjeu et de malaise cinématographique.
Power Ranges est un film qui se prend bien trop au sérieux pour son propre bien. A cause de ça, il étouffe ses rares fulgurances, à savoir un final qui aurait pu être encore plus fun et une méchante qui fait honneur à ce qu'est Power Rangers. Le reste n'est qu'un prêchi-prêcha opportuniste dans son abattage de drama qu'il est devient terriblement gênant. Faisant tout les mauvais choix d'écritures et ne parvenant jamais donner forme à ses intentions, le film s’effondre comme un château de cartes et il ne peut ni compter sur une réalisation amorphe, ni sur un casting aux fraises pour venir lui donner une quelconque substance. C'est d'autant plus dommage qu'à quelques moments, Power Rangers arrive à dessiner les contours d'un film qui aurait vraiment pu être meilleur.