La metteuse en scène de la série Connasse diffusée sur Canal , Noémie Saglio et Maxime Govare, tous deux issus de l’univers télévisuel, co-réalisent leur premier long métrage pour le cinéma, Toute première fois. Cette toute première fois, on s’en souviendra, on s’est réellement poilé.
Jérémie (Pio Marmaï que l’on a suivi l’année dernière dans La ritournelle et Dans la cour) va bientôt se marier avec Antoine (Lannick Gautry, bien meilleur que dans Les Francis). Mais voilà, ce matin, il s’est réveillé dans les bras d’Adna (Adrianna Gradziel), une grande suédoise. Jérémie n’a jamais aimé une fille auparavant.
C’est avec le terme impropre de « coming-in » que le film était présenté au cinéma. Un terme dérangeant parce qu’il supposerait que l’on revienne dans le droit chemin. Heureusement, Toute première fois n’est pas du tout sur ce registre. Au contraire, il ne fait aucune distinction entre amour hétérosexuel et amour homosexuel. Il fait de l’Amour, cet objet universel et prépondérant de la psyché humaine qui peut surgir à tous moments dans nos vies et se soucie peu des apparences. Film romantique, la première qualité de Toute première fois est de ne pas se calquer sur la sempiternelle trinité : rencontre, rupture, réconciliation. Sa seconde qualité intrinsèque, c’est de ne pas laisser celui qui se fait larguer sur le bord de la route. Bien souvent, on éprouve un certain malaise, devant des tas de films romantiques, à se rendre compte de la facilité avec laquelle celui-ci est rayé de l’équation. Trouvant un nouveau départ, le personnage que l’on suit sans va comme ça, comme si de rien n’était. Ici, dans Toute première fois, Jérémie est longtemps en proie au doute, ne veux pas blesser Antoine, tente d’arranger les choses, bref, il est plus proche de notre réalité que ne le sont les standards hollywoodiens. Parce que quand même, on ne plaque pas dix ans de vies communes comme ça, sans un minimum de ressentis. Du coup, même s’il fait souffrir Antoine, on l’aime bien ce Jérémie. Tout simplement parce qu’il est humain.
Et puis, surtout, autant Toute première fois est assez sérieux en ce qui concerne les sentiments amoureux, autant il est très drôle. Charles (Franck Gastambide), l’associé de Jérémie est tout délicieusement à côté de ses pompes, à la fois séducteur et terriblement maladroit avec les femmes. Clémence (Camille Cottin) en comptable frustrée ne sachant pas dévoiler ces sentiments est irrésistible. Alors que Charles n’y comprend rien, celle-ci devient exécrable, rappelant son rôle dans la série Connasse. Le meilleur ami d’Antoine et Jérémie, Nounours (Sébastien Castro), peintre de son état, homosexuel également, entretient une passion pour les vagins qu’il peint sous toutes les formes. Génial en tant qu’artiste sensible, voire trop sensible, le regard des autres personnages sur son travail donne des situations bien cocasse. La palme du second degré est décerné à Frédéric Pierrot et Isabelle Candelier (vu dans Bon rétablissement !) qui interprète les parents de Jérémie. Une scène à table, où il avoue avoir trompé Antoine avec une femme, vire au grand n’importe quoi et fait tomber les masques, quoique les révélations de ses parents mais également de sa sœur Sarah (Nicole Ferroni qui anime de très bonne chronique sur France Inter) ont de quoi surprendre, entretenant le côté décalé du film. N’oublions pas l’excellente scène de sérénade sur J’ai encore rêvé d’elle de Il était une fois dont je ris encore à l’écriture de ces lignes.
Courez-voir Toute première fois sur grand écran avant qu’il ne soit trop tard. Le film est un pied de nez réjouissant à la manif pour tous, prenant un train d’avance et la ringardisant encore un peu plus. À l’instar de La vie d’Adèle, Toute première fois prouve que l’on peut parler d’Amour et faire de très beaux, voir de très amusants films, peut importe la composition du couple à l’écran. L’Amour n’a pas de genre.
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