Le casting est limite mensonger, mais peut-être est-ce un hommage aux méthodes qui ont fait le succès de Golan et Globus. Ni Stallone, ni Chuck Norris, ni Bronson, ni la plupart des autres stars qui ont trempé dans l’aventure des studios Cannon ne font réellement d’apparition dans "The Go-Go Boys". Tout juste voit-on rapidement un ou deux extraits de leurs films. Seuls Jon Voight (pour "Runaway Train"), l’inénarrable Michael Dudikoff (pour l’ensemble de son œuvre de ninja yankee) et, à tout seigneur tout honneur, le sidéral et sidérant Jean-Claude Van Damme disent quelques mots. Menahem Golan et Yoram Globus, les vrais héros de ce docu, c’est un peu Dominique Strauss-Kahn et Thierry Leyne en version producteurs de cinéma. Deux semi-margoulins, lancés par quelques succès en Israël, qui vont épater la galerie en révolutionnant (soi-disant) le monde des studios hollywoodiens : films pré-vendus par paquets de douze aux distributeurs et tournés à l’arrache, cavalerie financière érigée au rang de huitième art, campagnes de promo masquant le vide des scénarios, crétinerie et bourinage élevés au rang de valeurs fondamentales… Tout cela se cassera rapidement la figure, sur fond de voltige comptable et de détournements de fond massifs, avec l’intervention en guest star d’un Bronson de la finance, le plouto-mafieux Giancarlo Paretti, et comme cocu définitif le contribuable français, obligé de combler avec l’argent de ses impôts les pertes abyssales du Crédit Lyonnais, agent du rachat de la MGM, pendant que Golan et Globus poursuivaient leur carrière en Israël. DSK et Leyne, on vous dit (le suicide en moins) ! La grande faiblesse de "The Go-Go Boys" est de jeter un voile pudique sur le côté franchement escroc des deux producteurs. Un ex-ponte d’un studio concurrent dit seulement « vouloir croire que Globus ne savait rien des magouilles de Paretti » - un peu léger comme argumentaire. De même, le film ne dit rien de l’arrière-plan idéologique sur lequel s’est construit le succès éphémère de la Cannon : l’Amérique reaganienne avait besoin de héros testostéronés et d’une vision du monde bourinement simpliste, qu’elle trouva dans "Invasion USA", "American Ninja" et autres œuvres phares du studio . Soyons juste : tout nanarophile d’hier, d’aujourd’hui et de demain sait ce qu’il doit à Golan et Globus qui auront au moins légué cet héritage à l’humanité. Pour le reste, "The Go-Go Boys" suscite un mélange d’admiration amusée et de dégoût devant tant d’énergie, tant de science du baratinage, tant de poudre aux yeux, tant de situations baroques (Golan produisant, sur un malentendu, un film de Godard…) et tant de talent pour rebondir une fois la catastrophe consommée.