Voilà un film qui avait tout pour m’intéresser : Vincent Cassel et François Cluzet en tête d’affiche, remake d’un film de Claude Berri de 1977 et réalisé par Jean-François Richet ("Mesrine, Ennemi Public n°1", "Mesrine, L’Instinct de Mort", "Assaut sur le Central13"), même s’il faut avouer que ce nouveau film fait presque « intru » au sein de sa filmographie. Sur le fonds, le film est identique à son modèle : au cours d’une soirée où il s’est alcoolisé, un quadragénaire se laisse séduire par la fille mineure de son meilleur ami et couche avec elle. Mais sur la forme, la version 2015 semble être plus « lisse » : vue aérienne d’un ferry sur la mer, reflet du soleil sur l’eau argenté, paysages des côtes corses, « La Mer » de Charles Trenet en fond musical, des gens en maillot de bain et lunettes de soleil, les vacances, la farniente, les soirées techno avec alcool….c’est étrange comme le film ressemble à s’y méprendre à une carte postale, voire une vieille publicité pour une agence de voyage. Si les images sont belles et agréables, leur côté « cool » écarte totalement le sérieux du sujet à savoir un homme qui couche avec la fille de son meilleur ami qui a la moitié de son âge (tout en étant mineure !!). C’est dommage car on aurait pu y voir une intention délibéré de transformer un paradis en véritable enfer, mais on a plus l’impression de faire face à un vulgaire cliché. Cependant, si on occulte le choix esthétique particulier, force est de reconnaître que le film se regarde avec plaisir avec au début un humour porté sur le décalage des pères venus se ressourcer dans un lieu idyllique et des filles qui refusent de se passer de leur confort habituel (Facebook, les smartphones, la TV). C’est bien amené et relativement frais. Puis survient « l’incident », l’élément déclencheur qui va exploser le gentil cocon amical. Et c’est à ce moment précis que l’on retrouve le Jean-François Richet que l’on connaît et son goût pour les personnages un peu torturés : le film tourne alors aux malentendus assaisonnés de quiproquos qui retranscrivent l’ivresse d’un premier amour qui vire peu à peu à la psychose et transforme une gentille gamine inconsciente en terrible monstre narcissique. Car oui, si vous détestez les petites poufs modernes hautaines et imbues d’elles-mêmes, vous ne pourrez « qu’apprécier » la prestation de Lola Le Lann qui joue son rôle à la perfection (à chaque fois qu’elle sourit, on ne sait jamais si on doit fondre ou si on doit lui filer un coup de boule !). D’ailleurs elle n’est pas la seule car la réussite du film tient essentiellement sur les performances de son casting : Cassel est parfait en homme mûr et viril qui n’assume pas de passer de statut de « tonton cool » à celui d’amant secret (il est d’ailleurs à ce titre largement plus crédible que Jean-Pierre Marielle dans le film de Berri), Cluzet est très attachant en papa poule surprotecteur et gaffeur à ses temps perdus et je dois avouer que j’ai énormément apprécié la petite Alice Isaaz en copine lucide se sentant trahie par sa meilleure amie et par son père. Sans être une révolution cinématographique, "Un Moment d’égarement" est un film honnête et sympathique, qui a au moins le mérite de ne pas être un vulgaire « copier/coller » de son modèle d’origine. Le seul reproche que je lui ferais est le choix plus que douteux (immoral ?) de la fin qui laisse suggérer que finalement tout cela n’est qu’un jeu sans aucune importance ni conséquence…critique de l’insouciance de la jeunesse actuelle ? Allez savoir…Une chose est sûre : Richet se débrouille bien mieux avec des histoires de gangsters.