Le cinéma britannique sait, comme personne, nous décrire les tragédies qui ont forgée son histoire, qu’elles soient historiquement éloignées ou plus contemporaines. Plus proche de nous, le cinéma britannique a su amorcer un virage radicalement différent, tout en gardant à l’esprit l’envie de pouvoir dénoncer les années Thatcher, où l’errements de sa population dans un monde capitaliste qui ne manque plus d’occasion pour noyer les ouvriers, avec ce que l’on appelle maintenant les « Feel Good Movie », des œuvres dont le sujet grave est traité avec suffisamment de sincérité, d’humour et de tendresse, pour amener le spectateur à se rendre compte d’un sujet sans pour autant avoir envie de fuir loin de là. Les plus précurseurs les plus célèbres furent notamment : « The Full Monty » de Peter Cattaneo ou encore « Billy Elliott » de Stephen Daldry.
« Pride » de Matthew Warchus (Simpatico) nous plonge dans l’enfer de cette grève de 1984 au Royaume Uni, dans laquelle les mineurs s’opposèrent au gouvernement de Margaret Thatcher, afin de préserver leurs emplois et par-delà leurs communautés dont l’économie reposait essentiellement sur ces mines de Charbons. Loin d’une bataille idéaliste et communautaire, la dame de Fer voulait en faire l’exemple de sa détermination à changer les mentalités d’un pays fort de son communautarisme et de son esprit conservateur, pour l’entrainer de force dans le capitalisme. Elle n’hésita pas à affamer ces ouvriers pour les faire plier. Une plaie toujours béante dans les milieux populaires anglais. Mais une autre population était également souffrance dans les années 80 : La communauté Homosexuelle. Largement stigmatisée, souvent persécutée, elle devait encore au cœur de Londres se battre pour ses droits, pour sa reconnaissance, contre les idées reçus, les insultes et les quolibets, mais également contre un ennemi beaucoup plus insidieux : Le sida, qui faisait déjà ses premières victimes.
Très loin d’un film caricatural, Matthew Warchus, aidé du scénariste Stephen Beresford (The last of the Haussmans), livre une œuvre d’une grande tendresse, intelligemment écrite qui s’efforce de retranscrire avec beaucoup de précision et suffisamment de détachement et d’implication pour ne pas être caricaturale. La réalisation nous évite les grandes tirades pleines de bons sentiments pour, laisser au contraire l’empathie des personnages faire son effet. Jamais dans le piétinement, le film entre directement dans le vif du sujet, ne prend pas de gant et distille son message de tolérance et de solidarité d’un temps pas si éloigné que cela. Un message dont on a particulièrement besoin en ces moments où les communautés ne semblent plus vouloir se parler ni se prendre la main pour s’unir dans un combat qui s’avère au final, bien plus commun qu’il n’y parait.
Bien sûr il faut ajouter à la réussite de ce film, la distribution rigoureusement précise, qui ne fait pas dans l’exagération à l’instar d’Imelda Staunton (Harry Potter) et de Bill Nighy (Love Actually). Mais surtout les deux jeunes révélations : Ben Schnetzer (la voleuse de livre) et George Mackay (For those un peril) dont les prestations sont remarquable de justesse, le premier dans le rôle de Mark, le leader du groupe d’Homosexuels et le deuxième dans la peau de Joe, un jeune homme timide et réservé qui se découvre un sens à sa vie dans la lutte. On pourrait bien évidemment passer toute la distribution en revue tant elle brille par une évitable sincérité et un sens réel de solidarité qui transpire à chaque plan.
En conclusion, « Pride » est assurément un « Feel Good Movie » (un film qui fait se sentir bien) tant la sincérité du propos, la tendresse dans la retranscription de cette histoire vraie où deux mondes que tout opposait se sont trouvé un ennemi commun et ont su tisser une amitié réelle et solide. La réalisation sobre, reste toutefois efficace. On rit énormément, on s’attendrit beaucoup et surtout on retrouve l’espoir que tous les préjugés quels qu’ils soient finissent par laisser place à la solidarité et à l’amitié pour que notre monde futur ne soit pas fait d’individualisme pesant et que les différences deviennent au contraire des moyens de se connaitre et de s’unir pour un même combat.