Ce film a déclenché en moi une angoisse persistante et insistante. Mes deux voisines, avant le commencement du film, m'ont demandé de quoi ça parlait et s'il y avait de l'action. Je leur ai lu la présentation faite dans le Pariscope, puis ai ajouté, quant à l'action, que d'après la bande-annonce, c'était probablement le cas. C'est cette bande-annonce, qui m'avait donné envie de voir le film, qui avait suscité mon intérêt pour en savoir plus sur l'univers des gens du voyage et sur leur langage. En fait, l'angoisse que j'ai éprouvée, s'apparentait à celle que j'ai ressentie face à plusieurs films de Robert Altman ("The company", "Prêt-à-porter"...). La première partie du film est assez lente, d'ailleurs mes deux voisines ont quitté la salle, d'autres spectateurs également. Ensuite, à l'angoisse s'est ajoutée la révolte. J'étais révolté par ce langage grossier ponctué à tout bout de champ de "mes morts", "batard" ou de "t'as raison ma couille". Révolté également par le discours tenu sur les femmes, sur la sexualité : je hais cet irrespect de l'autre, ce négativisme face à la société. Je hais que les policiers deviennent "les Schmits" à abattre. Je hais cet hymne à la vitesse, à la fulgurance, à l'irrespect de l'autre. Evidemment, je dois avoir l'air très conventionnel en déclarant être choqué. Cette délinquance violente exercée par des loosers nuit à la vision des gens du voyage, qui ne sont pas tous marginaux. En plus, il y a Dieu, qui est convoqué dans cet univers bourré de contradictions. Oui, il y a de la misère, des difficultés à trouver de quoi manger, mais les moyens de lutte pour la survie, qui sont mis en oeuvre me semblent peu fédérateurs, peu productifs. La manière dont est traitée la virilité me semble caricaturale. La lutte des classes, le combat féministe, les luttes pour l'égalité des sexes, tout ça est balayé et moi, j'ai envie de vivre dans un monde, qui fait droit à l'humanité, où l'on ne "chie pas à côté de sa voiture, pour pouvoir remonter dedans la crotte au cul si les Schmits arrivent"! Ca n'est pas ça le monde que j'ai envie de défendre, encore moins de soutenir. Autant "Party girl" me semble un film audacieux, engagé, émouvant, tout en mettant en scène des personnages de la vraie vie, autant ici la famille Dorkel très présente au regard du générique ne m'a pas permis de m'identifier à leur condition, à comprendre leur univers. Je ressors avec le sentiment d'une intégration impossible, comme si seule la coexistence à distance était la seule solution possible. Le monde dans lequel je vis est violent, brutal, rejetant, excluant, mais j'ai toujours l'espoir que chacun y trouve sa place. Cet espoir est mis à mal par ce film et moi, j'ai envie de continuer à croire en l'humanité et en l'espoir que la cruauté puisse s'amenuiser.