Le seul univers connu et imaginable d’un garçonnet de 5 ans se résume à la chambre dans laquelle il est né, en compagnie de sa mère qui y est depuis 8 ans. Hormis la télé, sa seule source d’inspiration, de savoir, de valeurs, d’illusions, de prison mentale autant que de beauté et de créativité, sont les histoires qu’elle lui raconte, les fables qu’elle lui sert sur la vie pour ne pas qu’ils sombrent tous deux, autant que les terribles vérités quand elles sont nécessaires.
Bien qu’inspiré de l’affaire Fritzl, l’enjeu essentiel de ce film irlando-canadien, une fois acquise leur accession au monde extérieur, converge vers l’apprentissage effrayant de la liberté pour la gamin d’une part, et d’autre part vers la plus difficile traversée post-traumatique de la mère. Le thème mythique de la caverne de Platon constitue la clef de voûte de ce drame psychologique sentimental, appliqué particulièrement à l’enfant bien sûr, dont le formatage encore rattrapable lui permet de plonger dans un univers inconnu, où chaque objet, notion de distance, de temps, de sensorialité ou de la moindre relation humaine, se heurte d’abord à l’incompréhension la plus totale.
Avec un jeu d’acteurs magnifique, et un brio scénaristique et psychologique intégrant remarquablement les sentiments et une humanité touchante et captivante, cette merveilleuse, cruelle et bouleversante aventure consacre sa première partie à la vie dans la « room », et la seconde dans le quotidien de la surconsommation américaine. Chaque terrain engendre ses illusions, sa perception, son ignorance, ses mensonges ou ses informations, et induit le pouvoir conséquent de fabriquer le monde, avec ses limites, choix et rêves, en révélant effroyablement l’analogie avec laquelle chacun de nous les applique finalement dans le sien.