Voilà un petit film d’à peine 90mn qui repose entièrement sur les frêles épaules et le charme d’Isabelle Carré. Le reste du casting, à commencer par le fameux Fabrice (sa victime) est très en retrait puisque le film tourne entièrement autour du personnage lunaire de Perrine. On appréciera quand même l’audace d’avoir donné au mystérieux inconnu un physique lambda (sans vouloir manquer de respect à Philippe Rebbot) et donc, ne pas avoir cédé à la facilité de recruter un bel acteur ténébreux pour ce rôle ! C’est quand même un pari un peu gonflé dans le cinéma hyper formaté d’aujourd’hui ! Isabelle Carré excelle dans ce genre de rôle toute en délicatesse et en fragilité. Son personnage rappelle d’ailleurs étrangement celui qu’elle interprétait dans « Les émotifs anonymes ». Du coup, çà donne l’impression qu’Isabelle Carré est un peu « la timide-légèrement barrée de service », un peu dommage pour une comédienne de ce calibre ! C’est un registre qu’elle maîtrise tellement bien qu’on se demande quelle autre actrice aurait pu incarner Perrine à sa place ! Son personnage est charmant, bien incarné mais quand même à la limite de la caricature. Que ce soit sa gentillesse naturelle (elle doit se débarrasser d’une souris qui lui pourrit sa vie chez elle mais refuse les pièges traumatisants), son côté gaffeuse, ses réactions presque enfantines (le coup de l’ours en peluche), sa tendance à se dévaloriser (elle se choisit le pseudonyme de Grossenouille sur Ebay), tout est un poil trop poussé pour être crédible. Du coup, un personnage auquel on aurait pu s’identifier un peu nous apparait comme trop gros pour être vrai et du coup… on n’y croit moins, forcément. Le film souffre aussi d’un scénario un peu cousu de fil blanc, avec une teinte vaudevillesque très prononcée (que de quiproquo !) et avec une fin sans surprise, alors que çà aurait pu être l’occasion de quelque chose de plus original, de plus subtil, de plus doux-amer éventuellement. Là, on se retrouve devant une fin digne d’une comédie sentimentale US. C’est d’autant plus dommage que les pérégrinations de Perrine sont bien amenées, cette espèce de fuite en avant dans la vie de cet inconnu qui pousse la jeune femme à trouver en elle une joie de vivre qu’elle ignorait elle-même s’enchainent bien, sans trop de temps morts. Il y a un humour délicat parsemé un peu partout dans le scénario. Enfin, il est parfois délicat, et parfois un peu plus « facile » (le costume de banane). Les dialogues sont même assez fins, on ne s’ennuis pas. Enfin, sauf dans le dernier quart du film, parce que le film dure 1h23, ce qui est court pour un long métrage, mais il semble plus long ce qui n’est pas forcément très bon signe. En fait, c’est la fin un peu lénifiante du film qui s’étire un peu trop et comme on devine vers quelle fin on se dirige, il n’y a pas un brin de suspens pour accélérer le temps ! La réalisation de Marie Belhomme est assez conventionnelle, pas tellement d’originalité de ce côté-là. « Les chaises musicales » est un film écrit pour Isabelle Carré et repose presque uniquement sur elle : avec un personnage plus subtil et un scénario plus audacieux, çà aurait pu donner un petit film épatant. Mais là, çà ne donne au final qu’un petit film tout court…