Vu l'état d'inquiétude dans lequel m'avait laissée le twist du deuxième volet des Animaux fantastiques (
Croyance qui serait le frère caché de Dumbledore
, absolument impossible si on s'en tient à ce qui est écrit dans les livres !), je m'attendais à pire.
Je dois admettre que côté visuel, la franchise est spectaculaire, avec notamment des effets comme les "miroirs" (dont je n'ai néanmoins pas compris l'intérêt scénaristique). Il y a plus d'animaux fantastiques que dans Les crimes de Grindelwald et je n'ai pas boudé mon plaisir de revoir Poudlard, même brièvement, et de retrouver aussi l'humour potterien de la première franchise. Côté casting, Jude Law s'avère décidément un excellent Dumbledore, il a le charisme, la classe et la malice du personnage. Mads Mikkelsen, qui a eu la lourde tâche de remplacer Johnny Depp, se voit comparé à lui par de nombreux spectateurs, qui regrettent la "folie" de celui-ci, mais en ce qui me concerne, je trouve que Mikkelsen est un excellent choix. L'acteur est très subtil, et alors qu'il n'a que deux scènes avec Jude Law, l'alchimie entre eux fonctionne si bien qu'on a aucun mal à croire à leur histoire. Il aurait pu être un très bon premier choix pour ce rôle, et avec un scénario plus développé autour de son personnage, il aurait pu être carrément génial, car il correspond davantage à l'image que je me faisais de Grindelwald d'après la description faite dans les livres. Tout d'abord Grindelwald a été élève à Durmstrang, une école de sorciers qui se trouve approximativement en Europe du Nord ou de l'Est, et l'accent de Mikkelsen peut corroborer cette origine. De plus le jeune Gellert Grindelwald est décrit comme un garçon séduisant, et non comme un excentrique punk à crête blanche. Mads possède ce charisme étrange des beautés atypiques. Pour moi le changement est donc gagnant. Toujours côté casting, Dan Folger (Jacob) s'affirme comme un des personnages les plus attachants, et Eddie Redmayne fait le job, même s'il n'a pas trop l'occasion de faire évoluer son jeu.
Mais c'est à peu près tout ce qu'il y a à sauver dans Les secrets de Dumbledore. L'intrigue s'éparpille peut-être moins que dans le précédent film, mais justement, alors que les deux premiers volets souffraient d'une abondance de sous-intrigues qui diluaient l'intrigue principale au risque de paraître confus, cette fois, les personnages secondaires sont sacrifiés : Queenie a un développement minimal, et se retourne comme une veste ; Croyance perd toute l'importance stratégique qu'il avait dans les précédents films et son face à face avec Dumbledore intervient d'ailleurs très tôt dans le film, pour nous confirmer ce qu'on pressentait (
Dumbledore n'est pas son frère, c'était un mensonge de Grindelwald pour le monter contre lui
) ; Yussuf Kama semble avoir un rôle à jouer et finalement non ; Thésée Dragonneau n'a pas l'air de tellement porter le deuil de sa fiancée ; Tina est carrément écartée pour des raisons obscures... Quant aux nouveaux personnages introduits, comme Lally, ils présentent peu d'intérêt. La bonne nouvelle aurait dû être qu'on en arrivait enfin au vrai sujet de l'histoire : la relation Dumbledore/Grindelwald. Sauf que pour qui a lu les livres, il n'y a pas de réelle révélation. On savait déjà que Dumbledore était amoureux de Grindelwald (Rowling l'avait "outé" par voie de presse), et en une scène Dumbledore résume à Dragonneau l'histoire de sa sœur Ariana, un "secret" qui n'en est un que pour ceux qui n'ont pas du tout suivi la saga originale. De plus, dans les livres, ce qui s'est passé chez les Dumbledore n'est jamais sorti de chez eux, et il n'en a jamais parlé à personne, pas même à Harry, qui découvre tout après sa mort. On voit donc mal pourquoi il confierait quelque chose de si intime à Norbert Dragonneau, aussi fiable soit-il. Le secret de Dumbledore n'est donc pas le sien, mais celui d'un autre Dumbledore,
son frère Abelforth
. Un retournement de situation sorti du chapeau (magique) et qui n'est pas exploité de façon crédible et approfondi.
À part ça, l'intrigue se suit certes sans ennui, grâce au renouvellement constant des surprises du monde magique, mais sans grand génie au niveau narratif (Rowling est meilleure écrivaine que scénariste). On peut même relever des invraisemblances plus ou moins énormes (Croyance qui combat Dumbledore alors qu'il n'a jamais appris à maîtriser ses pouvoirs et qu'en plus
il est mourant
).
Le troisième volet se termine certes de manière ouverte (on sait que le vrai duel opposant Dumbledore et Grindewald interviendra plus tard) mais au moins il se clôt sans queue de poisson, permettant heureusement de tourner la page (a priori les volets 4 et 5 sont sérieusement compromis, faut de rentabilité au box-office).
Quel dommage tout de même, quand on pense au potentiel de cette histoire, et au talent des acteurs impliqués ! L'une des erreurs majeures de cette franchise selon moi est d'avoir voulu manger à tous les râteliers, en promettant à un jeune public un divertissement familial (les créatures magiques) alors que son propos se destinait plus à un public adulte (l'amour trahi et le parallèle avec la montée du Nazisme). Il ne faut pas mettre tous ses œufs de dragons dans le même panier.