Après avoir signé une fin de saga Harry Potter plutôt bancale et surtout une poignante introduction aux animaux fantastiques, David Yates reste sur sa lancée et amorce enfin des enjeux de taille dans l’univers de J. K. Rowling. Elle-même scénariste de ce second opus, elle promet une extension qui se recoupe subtilement avec les héritages acquis de Poudlard. Mais la justesse est sans doute ailleurs à l’heure actuelle, car le long-métrage proposé se veut paresseux, à l’image du rythme scénaristique qui aurait pu se montrer plus audacieuse. Nous tournons sans cesse en rond pour un dénouement qui n’a rien d’un climax sensationnel ou émotionnellement percutant. Tout est articulé de façon monotone et une mise en scène qui s’égare face à la masse de nouveaux protagonistes.
En effet, ces derniers sont extrêmement peu développés et la magie qu’on nous tend au nez ne prend pas la sauce Yates. Il s’est souvent fourvoyé dans certains cadrages, donnant de la longueur à ce qui n’était pas essentiel à la construction du récit ou à l’évolution des personnages principaux. Ici, encore la foi aveugle à l’adaptation et l’écriture de Rowling sur grand écran ne séduit pas. Cette collaboration a de quoi inquiéter, car autant nous tolérons quelques maladresses dans le premier volet servant d’introduction à un univers riche en créatures et en enjeux plus matures, autant cette suite abuse des répétitions et de scènes venant combler un vide scénaristique trop voyant pour qu’on passe à côté. Même, Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne) n’est pas épargné par ce détail, car on souligne une baisse de charisme lorsqu’il interagit avec des personnages humains. Nous le sentons très à l’aise avec les anciennes, comme les nouvelles créatures fantastiques qui enchantent notre séance, mais qu’apportent-ils réellement, si ce n’est un épisode éphémère étouffant la lisibilité du fil conducteur ?
Il existe du bon sentiment dans ce volet beaucoup trop dense pour qu’on en exploite les personnalités dominantes, mais leur nombre grandissant n’arrange rien et plusieurs d’entre-deux sont délaissé pendant toute l’intrigue. Tina (Katherine Waterston) nous revient encore plus naïve qu’autrefois, mais le charme n’opère plus ou très peu, car elle est particulièrement évincée par la présence de Zoë Kravitz au casting. Elle interprète une Leta Lestrange nuancée et paradoxale. Cela aurait pu être plus pertinent si on lui accordait plus d’interactions dans le présent et non dans les flashbacks. Il y avait peu de faux pas à son égard jusqu’au climax qui trahit les choix de mise en scène. Jacob (Dan Fogler) signe un retour humoristique plutôt simple et efficace, comme il a pu l’être, afin de reformer le pseudo-duo de Laurel et Hardy, peu exploité. Il continue d’apporter des conseils de vie simple d’un point de vue rationnel, sans qu’il n’y ait de magie qui vient pervertir les esprits les plus torturés.
C’est dans un Paris, trop illustratif, que l’on suivra le parcours de Gellert Grindelwald (Johnny Depp) et ses ambitions discutables. Ceci constitue tout l’enjeu de la saga et nous ne l’apprenons pas sur un dénouement timide et surenchéri par des effets spéciaux oubliables. Sa présence change radicalement le ton du récit, où on flirte aisément avec le thriller. La sombre photographie en témoigne, rendant presque certains passages illisibles, voire nauséeux. Malgré tout, nous buvons chacun de ses mots, car sa présence dans le sous-titre n’est pas un hasard. Ce qui l’est en revanche, c’est l’idée de « crimes » qui accentue sur un drame qui reste à venir. On en vient alors à son égal lumineux, Albus Dumbledore (Jude Law), attendu avec impatience. Pour le coup, il ne sera qu’introduit afin de laisser les nouveaux personnages s’exprimer, à tort et à travers. Nous en profitons pour redécouvrir un Poudlard raffiné, mais qui ne manquera pas d’apporter son lot de fan-service, ne servant pas le récit. D’autres passages insistent également sur des détails cherchant à provoquer de la nostalgie chez les fans, à juste titre, cependant la démarche ne plaît guère. Et c’est là toute la faiblesse du film. Il sprinte sur les enjeux majeurs et ralentit sur des étapes à peine distrayantes, ne servant pas les propos que nous attendions. Il serait alors inutile de parler de Croyance (Ezra Miller), dont l’utilisation est régie par la magie. Il intervient lorsqu’on a besoin de lui, mais le problème est qu’il n’est pas encore essentiel à ce que « Les Animaux Fantastiques : Les Crimes de Grindelwald » veut nous vendre. L’intrigue est incomplète et souffre d’une banalité, que l’on croyait identifiée et corrigée depuis le premier volet.