J’avais bien apprécié la dénonciation de Mondovino, dans un milieu si aseptisé, parler d’un sujet tabou et mis sous silence par bon nombre de médias, ça change et ça renouvelle le genre documentaire, on apprend vraiment quelque chose. Cette fois Nossiter part dans la dénonciation des AOC et sur les vins naturels.
Enfin disons plutôt qu’il se tape des vacances en Italie car ça ne se passe que là bas en gros, et les vins naturels sont assez vite zappés.
Avouons que cette fois la caméra bouge moins, et que les scènes de la vie quotidienne servent la trame, en cela c’est mieux que Mondovino. Les problèmes actuels au niveau de la santé, ainsi que ceux des contradictions entre authenticité-terroir et industrialisation-AOC, sont bien identifiés. Ainsi on comprend bien la fausse « protection », la relativité de la qualité des appellations (10% de cochon italien dans le jambon de Bayonne), et l’uniformisation qu’apportent les AOC. J’apprécie également le fait qu’on montre à quel point le capitalisme a prit le pas sur le côté agriculture du métier de vigneron. Il doit maintenant prévoir, calculer, programmer (quitte à modifier son assemblage), rajouter des produits chimiques en oubliant les fondamentaux ancestraux, standardiser pour représenter une marque, avoir toujours un meilleur rendement, calculer sa marge… bref tout faire comme pour un produit industriel et être représentatif de l’air du temps. Cette fois Nossiter va au bout de sa démarche car on a les tenants et les aboutissants, même si on sent dès le départ que c’est orienté et pas mal à charge, sans trop de modérations. Mention spéciale pour la différence entre une terre traitée (sèche) et celle laissée naturelle.
Par contre, je ne vois cependant pas l’intérêt des passages du cinéma muet, pour le côté traditionnel ? Cela rend plutôt pataud. On notera toujours pas mal de longueurs inutiles et de passages inadéquats ou sans rapports avec le sujet (le singe, la femme nue). Si le parallèle entre les racines des vignes et le passé humain est bien amené il n’est pas forcément vrai. Certains terroirs se font sentir dans le fruit sans pour autant traiter ou attendre des décennies que les racines creusent à des kilomètres.
C’est là la limite de ce documentaire : Nossiter impose trop son point de vue sans nuances et ne laisse pas assez de place à l’objectivité. Avec 1h23 de film il aurait pu rajouter 20 minutes de développement pour équilibrer sans que cela gâche l’ensemble, au contraire. Au final c’est bien construit quand même, on comprend bien, il y a de bonnes images et des arguments valables, c’est mieux que Mondovino, mais ça reste trop orienté pour être vraiment de grande qualité, dommage on n’est plus très loin.