Ce mercredi, nous étions au taquet pour le dernier film de Claude Lelouch. Vissés dans notre siège de cinéma, nous n’avons pas été déçus par le voyage qu’il nous proposait, que du contraire ! Très promu en France, la sortie d’ « Un Une » était un véritable évènement et on reconnaît que c’était amplement justifié. Après, soyons honnêtes : nous étions déjà acquis à la cause du réalisateur car nous n’avons manqué aucun de ses longs-métrages mais celui-ci s’inscrit-il dans la lignée ? Bien sûr ! Et on vous dit pourquoi en toute objectivité (enfin, on l’espère) :
Tout d’abord, parce que son casting est fantastique. Voir Jean Dujardin débarquer dans l’univers de Lelouch était une réelle surprise, quoi que… l’acteur a toujours raconté être un fan de la première heure de Jean-Paul Belmondo et Lelouch lui ayant offert quelques beaux rôles de grande envergure, il était tout à fait logique que le passionné de Bebel rencontre celui qui l’a fait tourné à trois reprises. Et il faut dire quel résultat est vraiment concluant. Jean Dujardin opte pour un rôle dans lequel nous ne l’avons jamais vu. Son personnage d’Antoine, compositeur de film imbu de sa personnage, drôle et sûr de lui fend peu à peu l’armure pour faire apparaître un homme rempli de questions et de petites fêlures de l’âme. A travers ce rôle, c’est un bel hommage à la profession qui est réalisé et on ne doute pas une seule seconde que Francis Lai, le comparse musical du metteur en scène a apprécié le clin d’œil. D’ailleurs, il est une fois de plus de service pour la bande originale d’ « Un Une » : on ne change pas une équipe qui gagne
Elsa Zylberstein, l’atout charme du film, illumine l’écran et la salle toute entière. On sait que Claude Lelouch aime les femmes et adore les filmer et Elsa ne fait pas exception à la tradition, que du contraire ! Son sourire, sa bonne humeur, sa joie de vivre, le plaisir qu’elle prend à incarner son personnage se partagent sans limite avec le spectateur ! Véritable guide de la culture indienne tout au long du film, elle fera de sa quête la nôtre et saura soulever des émotions chez tous ceux acceptent de la suivre… nous y compris. L’osmose entre Jean Dujardin et Elsa Zylberstein est totale et leur complicité à la ville comme à l’écran s’en ressent véritablement. On prend un plaisir fou à les voir jouer, sans doute autant qu’eux lorsqu’ils ont tourné.
Christophe Lambert et Alice Pol, plus en retrait, sont malgré tout indispensables au bon déroulement de l’intrigue et prennent la place qui leur est confiée avec beaucoup de charisme. Aucun des personnages du film n’effacent les autres et chacun a un impact sur la vie de ses comparses. Le quatuor, hautement professionnel, donne un ton savoureux au film et offre une jolie prestation constante tout au long de l’heure cinquante de film (qui cela étant dit, passe à une vitesse folle).
Notons aussi la présence exceptionnelle de l’incroyable Mata Amritanandamayi, appelée plus couramment Amma. Véritable icône en Inde, représentante divine de l’Hindouisme, elle a pour mission de distribuer de l’amour, d’écouter tous ceux qui viennent la voir, les étreindre et les guérir dans leur for intérieur. Objet d’un culte impressionnant, elle incarne la spiritualité mais aussi l’espoir et sera le but ultime du long voyage d’Anna et Antoine. Méconnue de notre civilisation européenne, elle est mise en valeur par le réalisateur de manière pudique et extrêmement touchante. Sa rencontre avec les deux personnages principaux est d’ailleurs l’un des temps forts du film.
Le thème abordé dans « Un Une » est original et vraiment charmant. Bien sûr, la figure du couple chère à Claude Lelouch est au centre de son film mais pas seulement. Car à côté du petit jeu de séduction qui anime Elsa Zylberstein et Jean Dujardin, on assiste à un voyage initiatique total. En quelques minutes, nous voilà emporté au cœur de l’Inde dans une quête de bien-être spirituel et quotidien. Et le road- movie ultra dynamique sera l’occasion de rire, de s’émouvoir, de s’attendrir, de se chercher, bref, de vivre et de voir la vie telle qu’elle peut exister dans la réalité. C’est une vraie bouffée d’oxygène comme on les aime !
Autre plaisir avouable : celui d’avoir suivi la promotion de l’équipe du film. Qu’ils s’agissent d’avant-premières, d’interventions radio ou télévisées ou encore d’articles, on a pu se rendre compte de la complicité qui est née de l’aventure cinématographique menée par Claude Lelouch. Il aime ses comédiens, les histoires qu’il écrit et filme, les lieux qu’il présente et cela s’en ressent une fois encore. La photographie est splendide, les visages des comédiens filmés à la perfection, les couleurs et les ambiances retranscrites avec un réalisme épatant. N’ayant pas peur des mots : « Un Une », c’est véritablement un condensé de tout ce que Claude Lelouch peut faire de mieux…
Alors bien sûr, les détracteurs du réalisateur ne manqueront pas de souligner qu’on reconnaît aisément les artifices dont use le septuagénaire : course en voiture filmée au niveau du sol, redondance du thème musical, voix off de Claude, allusions à certains de ses films, un membre de sa famille y tient un petit rôle. Tout y est... et pour cause, on est pleinement dans l’univers du metteur en scène et heureusement ! C’est après tout ce que nous sommes venus chercher et nous aurions été déçus de ne pas le trouver ! Les fans souriront lors de tous ces petits clins d’œil et se diront que c’est tout de même bon de se sentir à la maison !
Seul petit bémol dans la partition fantastique d’ « Un Une ». Les dix dernières minutes qui filent vers un happy end prévisible, auraient très bien pu ne pas figurer dans le film. On aime voir une histoire se terminer dans un certain suspens et on apprécierait imaginer la suite des événements sans qu’on nous la serve sur un plateau d’argent. Mais là, on chicane un peu car à la sortie de la séance, on se sent léger et heureux d’avoir partagé ce très joli moment ciné. Si certains se donneront à cœur de critiquer (une fois de plus ?) le réalisateur, nous, nous aurons savouré son dernier petit bonbon avec un plaisir incommensurable et nous aurons su prendre cette belle dose de bonne humeur à l’état pur. N’en déplaise à certains, le cinéma français a encore de très belles heures devant lui et avec un maître comme Claude Lelouch, on sait que ses lettres de noblesse ne sont pas prêtes de se ternir !