Dans le film, une mère qui a accouché sous X et sa fille se rencontrent par hasard, sans savoir qui elles sont l’une pour l’autre. La réalisatrice Ounie Lecomte explique que l'idée d'une telle coïncidence lui est venue avec l’image mentale hantant les gens qui ne connaissent pas l’identité de leurs parents ou de leur enfant. Mais surtout de par la lecture d'un fait divers sur une infirmière à New York dont le père avait quitté le foyer quand elle était toute petite et lequel s'est, plusieurs années après, retrouvé hospitalisé dans l’hôpital où elle travaille...
Ounie Lecomte a voulu questionner la thématique de l’accouchement sous X parce qu'il permet d'explorer la question de l’identité : "Peut-on se construire « pleinement » sans cette part manquante de son histoire ? Ici, la question se pose aussi bien pour la fille que pour la mère."
Les personnages d'Elisa et Annette établissent un lien dans un cabinet de kinésithérapie, donc un lien qui passe essentiellement par le corps : "Le toucher, la sensation, la perception de l’autre et de soi… Finalement n’est-ce pas ce qui se joue dans les tout premiers « corps à corps » entre la mère et l’enfant ? Peut-être Elisa et Annette vivent dans les séances de kiné quelque chose de ces contacts qui leur ont manqués, de manière inversée. Et puis le corps est fait de points, de noeuds, de zones qui se bloquent, se débloquent. Dans l’intimité des soins, il y a l’idée que des choses vont se délier à l’intérieur du corps et résonner chez l’une et l’autre, l’une sur l’autre. Est-ce qu’une « mémoire de leurs corps » se (re)construit ? Est-ce qu’au contact de l’une et l’autre, elles vont pouvoir se reconnaître ? C’est effectivement cette tension et ces questions qui se jouent", précise Ounie Lecomte.
Le premier film d'Ounie Lecomte, Une vie toute neuve, avait aussi pour héroïne quelqu'un d'abandonné. Mais de manière différente, puisque dans ce dernier il s'agissait d'une fille de neuf ans placée dans un orphelinat. Dans ce deuxième et nouveau film, il est question d’un abandon dans la toute petite enfance.
Le personnage d'Elisa est kinésithérapeute et la réalisatrice Ounie Lecomte a rencontré pendant l'écriture plusieurs kinés. De même, son interprète Céline Sallette s'est préparée deux mois avant le tournage avec une kiné qui a été ensuite consultante sur le plateau : "Anne Benoit a rejoint la préparation de Céline en tant que « patiente-cobaye ». Les séances ont été filmées et montées pour permettre à Céline de mémoriser les gestes et les rythmes. Pour elle, c’était un peu comme une chorégraphie. Mais au-delà de l’enjeu d’authenticité documentaire, je voulais donner à voir et sentir chez ces deux femmes quelque chose qui se produit ailleurs, de manière organique. Avec une part sinon inconsciente, en tout cas mystérieuse…"
Céline Sallette a été choisie par le producteur Laurent Lavolé et la cinéaste Ounie Lecomte pour se glisser dans la peau d’Elisa : "Quand on s’est rencontrées après qu’elle ait lu le scénario, étonnamment, elle n’a pas évoqué son personnage mais celui de la mère et cette famille, qui la renvoyait à quelque chose de sa propre expérience. Ça m’a plu qu’elle ne se focalise pas du tout sur son rôle !"
En ce qui concerne Anne Benoit, c'est surtout après l'avoir vue dans Les Adieux à la reine dans un rôle bien différent (Rose Bertin) de celui qu'elle tient dans Je vous souhaite d'être follement aimée qu'Ounie Lecomte s'est dit qu'elle ferait l'affaire pour le personnage de la mère de Salette.
Le film se déroule à Dunkerque. Il s'agit d'un choix à mettre en parallèle avec le passé industriel de la ville. Derrière l'histoire de cette mère et sa fille, Ounie Lecomte ambitionnait de raconter en arrière-fond une histoire sociale et économique. Dunkerque, ville qui a été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale avec ses longues plages, ses docks, ses raffineries, est devenue un lieu idéal pour cela. Ounie Lecomte ajoute même que le cadre spatial du film est révélateur de l'état d'esprit d'Elisa qui "habite dans le quartier du Grand Large, construit sur les friches industrielles et portuaires, suivant une politique de réhabilitation et symbole d’un élan vers l’avenir."
En compagnie de sa directrice de la photographie Caroline Champetier, Ounie Lecomte voulait donner forme à une image douce dans sa lumière, sans rajouter de la noirceur, comme pour adoucir la douleur et la rage contenue propres au personnage d'Elisa.
Je vous souhaite d'être follement aimée est le second film d'Ounie Lecomte et son premier à être tourné en France. Son premier, Une vie toute neuve, avait été tourné en Corée.
Si Céline Sallette a suivi une préparation de kiné assez dense, elle n'a pas rencontré des femmes qui ont accouché sous X ou des enfants nés sous X. La comédienne explique pour quelle raison : "Je pense qu’on est tous, sinon des enfants abandonnés, du moins blessés. C’est normal. On naît pur et parfait et ensuite, on voyage à travers d’où l’on vient, de ces années de vie qui nous ont précédés et qui nous sont transmises, sans qu’on ait toujours les moyens d’en avoir conscience. En tout cas jusqu’à récemment car aujourd’hui, je trouve qu’on vit une époque assez réparatrice, qui a conscience de ces problématiques de transmission. Notre société encourage à la révolution intérieure et je pense que beaucoup d’entre nous peuvent s’identifier au chemin d’Elisa."