Je ne retire rien aux bons cotés que j'avais aimé la première fois. Mais, quand on le revoit en petit écran, et quand on connait déjà l'histoire, la longueur du film devient un handicap. Dommage, car il reste de vraies trouvailles et quelques scènes auraient pu devenir cultes. TV2 - novembre 2018
Un souffle d’air salutaire du côté du cinéma allemand, un air de jamais vu sans l’air d’y toucher, voilà avec ce Toni alias Winfried, un film qui augure bien de la rentrée. Oui le film est long, mais on sent que c’est volontaire dans un monde où tout va vite et dans lequel il ne faut pas perdre une minute. Alors on lui pardonne certaines longueurs. Parfois la caméra certainement portée bouge très légèrement, et cela m’a attiré l’œil inutilement. Car il n’y s’agit pas d’un parti pris de tourner caméra au poing comme chez Von trier/Vintenberg ou dans Le fils de Saul. Un conseil éventuel par ailleurs, lire avant la projection les paroles de la chanson de Whitney Houston The greatest love of all… Elles ne sont pas sous-titrées à l’écran, dommage et pourtant sont essentielles pour accompagner le chemin parcouru entre le père et la fille.
Il y a des trouvailles étonnantes dans ce film qui navigue entre la comédie, l’analyse de notre société productiviste et individualiste, la difficulté de se parler entre générations, ou entre sexes opposés. L’humour grinçant et parfois déplacé de Winfried, son côté ronchon soixante-huitard vieillissant, pourraient être insupportables si n’existait pas son double Toni, une fenêtre ouverte sur notre innocence perdue, sur la force de l’autodérision, sur la nécessité d’être en accord avec soi-même.
Maren Ade ne se perd pas dans ce dédale des genres, et son film reste crédible parce que basé sur une bonne partie de ce qu’elle a vécu elle-même. Elle nous fait rire franchement ou jaune quand la carapace se fend. Chez Erdmann, il y a un petit côté Begnini dans La vità è bella : un homme prêt à toutes les loufoqueries pour redonner du sens à la vie que mène son enfant. Ici l’enfant est devenu une adulte, Inès mène la vie qu’elle a choisie, rude et sans concession. Elle va se retrouver à poil au sens propre et au sens figuré pour décider si son choix doit être remis en cause. Le sens de la vie, quoi, une question bête et méchante, à laquelle elle a soigneusement évité de répondre jusqu’ici. Et peut-être que son Papa, clown triste et orphelin de son chien, devra lui aussi y répondre.
GE aout 2016