Il y a quelque chose de profondément frustrant avec Alone, film français tourné en anglais et clairement prévu pour tous les festivals internationaux possibles avant même sa sortie : c'est qu'il avait le potentiel d'enfin faire un bon film français de genre (on se tournera vers Dans la brume pour se contenter de notre cinéma d'auteur et de genre), et se vautre lamentablement pour plusieurs raisons.
La première, sa prétention palpable : se croyant le renouveau des films de zombies, Alone tente de s'approcher d'un 28 jours plus tard version adolescent, amenant le teen movie comme si c'était la remise à neuf d'un genre beaucoup trop abordé par des blockbusters américains ultra-violents et sans âme. Et s'il se montre particulièrement sanglant, nul doute que ses interminables dialogues marqueront une cassure avec sa volonté d'être fin dans son approche du genre.
Des dialogues d'ailleurs trop vulgaires et stéréotypés pour le faire entrer dans le cercle fermé des grands films indépendants de genre : basés sur un langage de cité peu pertinent, ils servent de développement psychologique de personnages pourtant fades et vides, clichés de ce que l'on trouve habituellement dans le genre, chacun étant programmé pour avoir son moment de gloire et sa mort prochaine.
Il y aura une volonté de surprendre par une conclusion pessimiste et pleine d'effets de style qui, sans attachement possible aux personnages présentés, ne trouve aucune autre répercussion que celle d'avoir l'impression avoir vu le film pour rien. Vite amenée, filmée bordéliquement, elle tombe comme un cheveu sur la soupe et ne brille que par son timbre terne et le décors posé, l'image étant animée par des vagues alors très bien filmées.
Un climax d'autant plus dépitant qu'il se base sur des ennemis en lesquels on ne croit jamais; erreur d'écriture ou de casting, ces enfants rebelles, doux plagiat de Mad Max (sans le punch et la justesse), jouent en y croyant sans être jamais crédibles, et font plus monter le sourire aux lèvres que descendre les larmes aux joues. Une situation d'ailleurs identique en VF comme en VO.
On tentera de se rabattre sur le héros pour trouver quelques qualités réconfortantes; là encore, c'est une des raisons de la chute du film. Ni charismatique ni talentueux, Fergus Riordan (déjà présent dans Ghost Rider : L'esprit de la vengeance) semble n'avoir été choisi que pour sa gueule atypique, lui qui mène sûrement l'une des relations amoureuses les plus maladroites que l'on ait pu voir dans le genre.
C'est Madeleine Kelly qui, chargée de lui donner la réplique en tentant de le séduire, gâche toute l'utilité du personnage de Riordan; elle qui incarne tous les clichés possibles de la femme forte du cinéma de genre, incarne plus la volonté du film d'américaniser son intrigue que ses quelques tentatives d'en faire un personnage profond, attachant et bien développé. Pourtant investie, elle incarne, malgré les apparences, la véritable héroïne, devant Riordan et le reste d'un casting sans intérêt qu'on se préservera de citer cas par cas.
Résumons les simplement en faisant un rapprochement avec la caricature des citées proférée dans Les 3 Frères : Le Retour, duquel Alone semble s'être inspiré pour organiser les personnalités de chacun des protagonistes, et écrire les dialogues navrants dont il nous fait part durant sa très courte heure vingt (et qui s'étire comme en trois heures d'ennui).
Le principal problème d'Alone, c'est donc qu'il recopie plus qu'il invente, qu'il se développe trop dans le superficiel plutôt que de nous livrer ce qu'il voulait vraiment faire; enrobé comme un film d'auteur de piètre qualité, sentant bon le réchauffé de tous les côtés (on pense donc à Mad Max, aux Romero, à La Horde, à tous les teen movie apocalyptiques, dont le ...), il ne trouve ses marques que dans sa conclusion brutale et qui, par le manque de développement de ses enjeux et de ses personnages, tombe à l'eau quand on voulait se prendre une claque. Le coche est raté, l'expérience déplaisante, et le résultat si frustrant qu'Alone pouvait enfin redorer le blason des films de genre français qui jusqu'à preuve du contraire n'a, pour l'instant, aucun fer de lance prouvant que le meilleur reste à venir. D'un côté, il paraît difficile de faire pire.