« A perfect day : un jour comme un autre », intrigue autant par son affiche que par sa bande annonce. Novices de l’univers du réalisateur Fernando León de Aranoa, c’est assurément le qui nous a donné l’envie de nous y intéresser…et on ne l’a pas regretté !
Avec sa bande originale 100% rock, « A perfect day », nous montre combien tout ce qu’on verra dans ce film sera décalé et pourtant magistralement orchestré. En effet, c’est sur fond de « Sweet dreams » de Marylin Manson, « Pinhead » des Ramones « There is no time » de Lou Reed (en passant par Marlene Dietrich et Velvet Underground) que se déroule l’histoire de nos cinq protagonistes. Détachés dans la campagne balkanique aride pour aider au mieux une population locale démunie, on pouvait s’attendre à un film déprimant, moralisateur ou politique… et pourtant ! Rien de cela ne transparaît dans la dernière réalisation de Aranoa, que du contraire. L’humour est de mise, les situations sont cocasses, parfois dramatiques sans être (trop) sombres, et offrent un long métrage équilibré, très agréable à regarder.
Le secret de cette réussite ? Son casting de luxe excellentissime. Mais qui présenter en premier ? Difficile d’opérer un choix car le réalisateur a eu l’intelligence de mettre tous ses acteurs sur un même pied d’égalité. Aucun des personnages ne ressort plus qu’un autre, aucun comédien n’efface les autres et bien que l’on ait quelques préférences, on doit reconnaître que cette union fonctionne à merveille et nous fait presqu’oublier que c’est film de fiction que nous sommes en train de regarder.. ..Mais puisqu’il faut bien commencer par quelqu’un, autant le faire avec Benicio Del Toro (qu’on a adoré retrouver dans « Sicario » de Denis Villeneuve et dont la suite est en préparation). Avec son charisme et sa « gueule » bien à lui, l’acteur démontre une fois de plus qu’il est taillé pour des rôles de grande envergure. Dans ce film, il incarne un responsable de la sécurité blasé par les aléas de son métier. Tantôt ironique, tantôt empathique, son personnage roule sur les chemins caillouteux avec aisance, à l’image du comédien qui a su rouler dans une carrière sans faute.
A côté de lui, Tim Robbins grand par la taille (1,96m !) autant que par le talent. Il nous fait l’incommensurable plaisir de revenir sur nos écrans avec un rôle qui lui va comme un gant. L’acteur- réalisateur multi facettes (« Mission to mars », « Mystic River» qui lui a valu l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle, « La guerre des mondes») offre ici une prestation qu’on ne peut qu’adorer. Border line, déjanté, parano ou trop prudent, on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre… Surpris à chaque instant par ses répliques (truculentes, vraiment !) ou ses réactions, il démontre que l’étendue de son talent n’a pas de limite… On en redemanderait bien un peu mais comme toutes les bonnes ont une fin, il faudra se satisfaire de ces 1h45 de pur plaisir… Substantif étrange à écrire quand on connaît le résumé de l’histoire et la réalité que le réalisateur a voulu nous présenter…mais c’est pourtant la vérité : que bon moment ciné !
Côté féminin, on trouve Mélanie Thierry et l’ex-mannequin ukrainienne Olga Kurylenko. Alors que la première est une ressortissante française qualifiée dans le maintient de la qualité de l’eau et des conditions sanitaires, la seconde est une chargée de mission russe envoyée sur le terrain pour faire un rapport détaillé aux Nations Unies. Chacune à leur façon, elles apportent un brin de charme et de candeur dans cet univers dévasté. Sensible ou forte, les deux jeunes femmes prêtent leurs traits à des personnages teintés de sincérité.
Et pour compléter la dream team d’exception, on trouve un Fedja Stukan tout aussi performant que ses petits camarades. Si son visage semble connu (peut-être l’avez-vous aperçu dans « Enfant 44 », « Crossing Lines » ou « Au pays du sang et du miel » ?), on doit reconnaître que c’est pour nous, une vrai découverte, et qu’il mérite amplement sa place au casting ! Tout comme Sergi Lopez, dont l’intervention est un peu trop courte mais tellement appréciable. Ah Sergi, tu n’as nul égal et à chaque fois, tu nous régales !
A la fin de la projection, on ne peut donc que remercier Fernando León de Aranoa, réalisateur espagnol engagé pour ce « jour comme un autre » qui pour nous, ne l’était pas du tout ! Pourtant prolifique depuis 1997, il s’entoure de castings tout aussi méconnu pour nous, exception faite des « Lundis au soleil » où il fait tourner Javier Bardem, ou prochainement « Escobar » où il réunira à l’affiche Penelope Cruz et … tiens tiens, Javier Bardem. Ravi de la découverte, le rendez-vous est déjà pris pour son prochain long métrage et nous espérons qu’il nous offrira à nouveau une œuvre intelligente et insolite.
On a d’ailleurs pu lire, ici et là, que le film manquait d’originalité, de profondeur ou qu’il était affublé d’un scénario minimaliste… Soit, c’est vrai qu’il est plutôt simpliste (mais pourtant profond) et fort heureusement ! Une histoire plus « compliquée » aurait sans doute occulté tout le talent de réalisation et d’acteurs que l’on peut apprécier ici. Après 1h45 de film, la boucle est bouclée, le ressenti 100% positif, que demander de plus ? Nous, on a véritablement trouvé ce qu’on était venu chercher et on ne peut que vous recommander de faire un petit tour dans les quelques salles qui proposent ce petit bijou espagnol… un peu trop discret (ou modeste ?) à notre goût.