David O’Russell étant aujourd’hui un cinéaste avéré, Fighter ou le plus récent Happiness Therapy en témoignent, il fallait bien qu’il commence sa prometteuse carrière avec un film solide, pas dénué de défauts majeurs, mais solide tout de même. Ce film, c’est donc Three Kings ou en français, les rois du désert, faisant suite à quelques ratés. Ici, le réalisateur s’offre les services de George Clooney, déjà une vedette planétaire, mais aussi de Mark Wahlberg, lui en revanche, jeune premier. Sur fond de Guerre du Golfe, le réalisateur monte sa petite histoire de braquage. En effet, alors que s’achève la première guerre irakienne, le Koweït été libéré, quelques soldats peu scrupuleux se lancent dans une entreprise visant à taxer à l’armée de Saddam, en déroute, une partie de l’or volée au pays voisin durant la guerre.
Le ton décalé se fait d’emblée ressentir. Si l’on aurait pu se retrouver devant un sérieux témoignage sur la guerre en question, ce n’est absolument pas le cas. Russell se joue d’un contexte géopolitique pour amener une intrigue originale qui semble ne pas franchement trouver sa place dans le contexte, ce qui s’avère finalement plutôt amusant et la marque d’un film sans attaches particulières à une normalité hollywoodienne ne permettant pas ce genre d’écart. A ce titre, David O’Russell s’assume déjà ici comme un cinéaste indépendant et novateur, en pleine dissension avec le cinéma populaire de la fin du 20ème siècle, les années 90 ayant été plutôt stéréotypées. Il s’offre par ailleurs les services d’un George Clooney pour qui le rôle convient parfaitement, l’on ne peut mieux d’ailleurs, et permet à Mark Wahlberg de se faire un nom dans la peau d’un personnage plutôt fun.
Coté mise en scène, le réalisateur fait clairement la part des choses, d’un point de vue esthétique, entre les scènes d’extérieures et celles d’intérieures. Le désert et la sécheresse de l’environnement donnent lieu à une photographie aux couleurs saturées, au contraste criard, au contraire des intérieures, filmés plus froidement. L’on note aussi que l’action prend une place importante dans Three Kings, confrontant une poignée de soldats US en plein forfait crasse à l’armée de Saddam, vaincue mais pas pour autant enterrée. Accessoirement, Russell traite de la problématique des persécutions commises par l’armée du régime sur le peuple, un sujet on ne peut plus d’actualité, permettant de donner bonne conscience à nos héros US, le seul mauvais point concret d’un point de vue scénaristique.
Au final, le film se démarque habilement de ce qu’il aurait pu être, et l’on ne peut que s’en réjouir. Certains séquences sont par ailleurs de toute beauté, certaines dialogues tout bonnement excellents et l’atmosphère générale très agréable car inattendue. David O’Russell, sans pour autant faire miroiter un génie créatif majeur, démontre ici qu’il sera dès lors un réalisateur à prendre au sérieux. La suite lui donnera raison. 14/20