"Jamais de la vie" fait part d'une vision très juste et sans concession de la misère sociale d'une banlieue sans avenir, d'un monde désespéré et désespérant...
C'est en effet, à travers le regard de Franck, ancien ouvrier agitateur et véritable syndicaliste engagé, devenu ainsi et malgré lui veilleur de nuit dans un centre commercial, que l'on observe de façon dure et à la fois humaine, les conditions de vie de ces hommes et de ces femmes qui luttent sans cesse pour joindre les deux bouts !
Un nombre infini de petites choses nous est détaillé dans ces vie de misère par des petits détails, quelques mots ou expressions qui émanent de ces visages aux regards fatigués qui en disent long !
Olivier Gourmet, tout en finesse, excelle véritablement à ce niveau en homme désabusé, résigné et à la fois révolté, du sort qui lui est et sera réservé ! Il est le reflet d'un mal être qui se généralise chez les uns et les autres, de manière exponentielle...
Car en effet, sa future (?) retraite semble bien mal se présenter même si un prochain CDI se profile apparemment !
Ce qui est très beau, très juste et émouvant tient aux liens tissés avec quelques personnages comme le jeune Chad ou Ketu ce collègue inquiet pour sa famille restée en Afrique, puis cette conseillère sociale presque complice,...
De très bons moments en découlent et on se dit alors que ce cinéma réaliste est de plein fouet avec la vraie vie des vrais gens qui en bavent sans pouvoir croire à un horizon meilleur, comme cet ancien collègue retrouvé qui explique qu'on n'est pas au cinéma et qu'après une mauvaise chute, on ne se relève pas en forme avec juste un peu de sang, mais au contraire avec la hanche abîmée et une claudication bien réelle !
Cette peinture très noire est réalisée avec une extrême sensibilité et la souffrance comme la colère se font écho, tel un hurlement sans fin ou un geste violent et destructeur !
Les acteurs sont plus d'une fois surprenants, sincères comme Valérie Bonneton que je découvre enfin dans le bon sens, Marc Zinga ou même Bénabar...
Au milieu de ce désespoir, comme une histoire dans l'histoire, Franck depuis son parking, se met à observer un drôle de manège de ses jumelles, ce qui va le pousser à sa petite enquête qui va l'amener à découvrir ce qu'il attendait ou pensait fatalement dans un tel milieu...
Et le gros bémol concerne à mon avis, ce dénouement dont on ne dira absolument rien mais qui n'est pas cohérent par ce coup d'éclat qui ne semble pas du tout dans l'esprit du film, qui apparaît saugrenu, invraisemblable et dont les suites supposées sont peut-être bien loin de ce que le réalisateur veut laisser croire ou imaginer...
Dès lors, ce film très beau et délicat de Pierre Jolivet perd beaucoup d'intérêt, et c'est un peu dommage finalement alors qu'une toute petite lueur d'espoir et d'amour aurait donné un minimum de légèreté à ce tableau social très sombre, mais cruel et évident !