Polar british de facture conventionnelle, disons peu surprenant, qui s’illumine de la double présence de l’une des pointures de l’interprétation actuelle, Tom Hardy. Signé Brian Helgeland, scénariste reconnu passant à son tour derrière la caméra, Legend, biopic plus ou moins fidèle, plutôt moins, du règne des jumeaux Kray sur la pègre londonienne des années 60 fait montre d’une certaine complaisance, facilité narrative, s’appuyer comme sur un solide pivot sur la prestation de sa vedette, en deux exemplaires, pour s’illustrer, du moins sortir du lot et surtout, sortir en salles. Pari réussi pour la réalisateur, qui sans briller, en usant et abusant des codes du genre, sans culot particulier, parvient à livrer un film qui plait du simple fait du choix de son acteur principal, un solide comédien qui démontre, même dans une certaine exubérance, les talents formidables qu’on lui connaissait déjà.
Tom Hardy, donc, la clef de voûte de cette entreprise filmique, se dédouble en interprétant à la fois Reggie et Ronnie Kray, deux individus, frères jumeaux, qui se caractérisent par deux tempéraments bien différents mais qui règnent en tandem sur leur ville. L’un est mesuré, l’autre psychopathe. L’un est amoureux, l’autre incapable de sentiments. Ils cohabitent, bâtissent un empire puis se déchirent. On connaît la chanson, mais si bien interprétés qu’ils sont par un seul et même acteur, les deux gus sont un ravissement, un mélange imprévisible de violence, de roublardise. On avoue, certes, que la peinture faite ici des deux gangsters est un brin légère, un brin fantasque, du moins bien plus romancée que les évènements réels ayant conduits ses deux purs produits de L’East End du néant à la gloire, puis de la gloire à la déchéance. Les présences, dans des seconds rôles plus ou moins convaincants, de David Thewlis et Emily Browning, notamment, ne font qu’à peine de l’ombre à la vedette du moment.
Coté mise en scène, si le film est propret sur loin, impeccable de simplicité, la réalisation de Brian Helgeland manque souvent d’une certaine audace. Le cinéaste, semi-vétéran du cinéma, appelons-le comme ça, n’en reste pas moins un jeune réalisateur et démontre les faiblesses propres à sa position. Rien de grave, je vous rassure, si ce n’est un manque de personnalité. Idem pour ce qui est de la bande-son, parfois agréable, parfois dérangeante, en tous les cas bien trop aléatoire.
On retiendra donc de cet énième polar, film de gangsters s’il en est, quelques séquences bien torchées et surtout la double présence très charismatique de Tom Hardy. On en parle, on en parle, mais incontestablement, l’acteur donne vie à un film bien moins ambitieux qu’il n’y paraît. 14/20