Prendre un train céleste et s'envoler vers des cieux inconnus. Échapper à la guerre en s'inventant un monde enchanteur, pour oublier la violence et la mort. Cinquante ans après que l'armée soviétique ait annexé l'île de Chikotan, Junpei se souvient pourtant de tout, et nous raconte comment il a vécu avec son frère Kanta ces années d'après-guerre.
Depuis Le tombeau des lucioles, aucun film n'avait réussi à retranscrire avec autant d'intensité le quotidien de la guerre à travers des yeux d'enfants. Ces derniers, grâce à leur imaginaire débordant, nous emmènent dans une autre sphère, celle de la poésie et des couleurs flamboyantes. Plongés dans ce formidable songe, nous pouvons tout oublier car nous croyons, comme eux, que les étoiles sont là pour nous éclairer. Mais la magie, comme le rêve, ne dure qu'un temps et finit par s'estomper.
À hauteur de ces deux frères, les soldats russes sont pour nous des énormes masses désarticulées prêtes à tout écraser sur leur passage. Puis, grâce à des musiques fredonnées par ces deux peuples d'une seule et même voix, nous comprenons vite la chose suivante : ces militaires veulent rentrer chez eux et sont, comme tout le monde, fatigués par une guerre qui n'a pris fin qu'officiellement. La plume lyrique de Sugita arrive à créer deux frères que rien ne séparera, deux enfants plus courageux que n'importe quel adulte, deux personnages s'inscrivant dans la digne lignée des chefs-d'œuvre de l'animation japonaise.
On aurait pu raconter cet événement historique inconnu par un film en image réel. Mais où serait passer ces décors oniriques ? Comment traduire ce qu'ont en tête Junpei et Kanta ? Les mots seuls ne peuvent les expliquer, et le talent graphique nippon est alors primordial. Enchaînant les fondus au noir pour conclure ses scènes, Nishikubo réalise un morceau de bravoure, un hymne à la vie, et à l'espoir.