Avec un titre qui fait penser à ce qui pourrait être le dernier Marvel en date, Captain Fantastic est un film qui va bien plus loin. Si Matt Ross en est au stade de "jeune réalisateur" il crée avec son film une sensation unique, dans un monde consommé par la société, touchant aussi bien les comportements humains des uns que des autres. Captain Fantastic est un film qui fonctionne.
Il fonctionne parce qu'il est clair et lucide. Le message qu'il cherche à envoyer ne porte pas spécialement de jugements ou de morales. Il veut nous faire croire à une critique pure et dure des humains dans la société de consommation, mais il parvient à nous donner un revers de veste quand la famille et nous, spectateurs, se rendons compte du comportement parfois très dangereux du personnage de Mortensen à travers un dialogue entre "corrompus". Il y a en permanence une remise en question des deux cotés, et Matt Ross appuie cela sur des faits qui doivent mettre d'accord : celui de l'évolution et du bien-être des enfants. Le message n'est donc pas une critique, c'est tout simplement une mise en situation de l'époque de cette Amérique qui semble si triste dans sa vie quotidienne. La famille est comme un petit rayon de soleil anachronique qui a parfois des heures sombres mais parvient à garder une union qui ne peut que forcer le respect du personnage de Mortensen et nous donner une charge d'émotions très variées, allant du rire, aux larmes, en passant par la gêne, le dégoût, la colère.
Mais le scénario, aussi subtil, léger et intelligent soit-il, n'est pas le seul responsable de tout ça. Que serait un film sans de bons interprètes. Viggo Mortensen n'a clairement plus rien à prouver, parfait dans ce rôle de père protecteur aux idées discutables mais d'une sensibilité qui force l'empathie. Mais les enfants sont aussi à notés. Du plus âgé au plus jeune, tous disposent d'une justesse que l'on retrouve très rarement dans les films, offrant une interprétation terre à terre qui joue aussi sur notre perception. Cette famille donne du coup un univers propre à eux, dans leur forêt, qui donne une bouffée d'air au spectateur, qui les admire, les observe, sans vraiment comprendre leur motivation, nous qui avons grandi dans le confort et les normes de sociétés, qui ne sont pas toutes à remettre en cause comme l'explique si bien le film.
Avec une réalisation aussi très sobre et légère, le film gagne encore en intensité car Matt Ross ne choisit pas des plans iconiques ou symboliques, d'une beauté éclatant la rétine, il cherche des plans qui sonnent vrais. Des plans qui vont faire entrer le spectateur dans le vif de l'histoire, et dans les émotions des personnages, et cela marche à la perfection. Ajoutons à cela une bande sonore à base de cornemuse, d'harmonica et autres instruments beaucoup trop peu utilisés dans le monde du cinéma, et de reprises de grands morceaux avec une mise en place très différente. Captain Fantastic est beau. Captain Fantastic est un film qui rend bizarrement heureux et naïf, car il offre un message qui ne porte aucune rage, car il offre des personnages touchants au possible, sans tomber dans la caricature, car il offre une beauté au film avec cette forêt et ce choix de cadrage. Très peu de films comme cela sont possibles à regarder, et c'est un long-métrage qui mérite amplement d'être vu, et surtout, vécu.