"Battle of the Sexes" est un film globalement réussi, décrivant les années 70 du point de vue de la sexualité, entre témoignages sur les inégalités homme-femme
(salaire 8 fois inférieur pour les tenniswomen que pour les tennismen; zéro représentativité des femmes à la TV pour commenter le sport (à la fin, seul l'homme a un micro et le tend à sa guise à la femme))
, illustration d'une période traditionaliste
(commentateur macho jusqu'à l'os; l'organisateur et l'argument biologique ridicule; l'homosexualité mal perçue (on incite Billie Jean à cacher la sienne); le commentateur qui met sa main sur l'épaule de sa collègue comme pour établir un rapport de domination; Même Margaret Court critique le lesbianisme de Billie Jean au lieu de se ranger derrière elle en vue de défendre la cause des femmes)
et marqueurs de l'émancipation féminine
(un tournoi concurrent organisé par les femmes; la nouvelle coiffure de Billie Jean ou sa relation lesbienne alors qu'elle est mariée, symboles du fait de s'assumer, d'engager un nouveau départ et d'être libre; les photos dans les magazines; la fraîcheur de ses tenniswomen ne se prenant pas au sérieux; le choix d'un sponsor vendeur de cigarette, considérée comme un objet de rééquilibrage entre hommes et femmes (les femmes se mettent à fumer comme les hommes))
. Tout cela se traduit par l'exceptionnel Billie Jean King, incarnée à merveille par Emma Stone, pétillante et combattante malgré les obstacles. À l'opposé, on retrouve Bobby Riggs, un rôle idéal pour l'exubérant Steve Carell. J'ai adoré ce personnage car il est loin d'être le macho qu'on pourrait croire (à l'inverse du commentateur). Certes, il s'occupe peu de ses enfants et de sa femme, ne débarrasse pas son assiette après le dîner, mais ce ne sont que des relents de son éducation, Bobby est avant tout un parieur compulsif
(il continue (la voiture gagnée) bien que sa femme l'interdise)
qui joue du machisme pour le show
(entraînement en palme, avec une raquette énorme; le blouson trop chaud en plein match pour le sponsoring; les photos nus)
et aller toujours plus loin dans le pari. Ironiquement, on peut dire qu'il n'avait pas besoin de cela pour perdre, son âge était une raison suffisante pour justifier l'écart physique entre Billie Jean et Bobby sur ce fameux match (bien reconstitué d'ailleurs), et donc quelque part, les actes de Bobby ont aidé la cause féminine sans pour autant être une défaite, un sentiment contradictoire que l'on perçoit un peu plus à la fin,
quand Billie Jean pleure de joie mais se rend compte que le plus dur commence pour elle (assumer ce caractère iconique qu'elle vient d'acquérir), alors que Bobby sourit à sa femme, comprenant qu'en s'inclinant, il est retombé sur terre et que ça va l'aider.
Mon seul gros bémol là-dedans, c'est la réalisation du duo Jonathan Dayton/Valérie Faris, trop longue dans l'ensemble, il y avait matière à raccourcir certains passages
(en particulier tout ce qui concerne la préparation de l'affrontement entre Margaret Court et Bobby Riggs)
. Bilan, si le film tire en longueurs, le contenu est un beau plaidoyer pour les causes féministe et LGBT, porté par 2 acteurs excellents.